La Ville de Pierre de Guo Xiaolu

La Ville de Pierre de Guo Xiaolu
(Shi tou zhen)

Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

Critiqué par Bertrand-môgendre, le 22 février 2014 (ici et là, Inscrit le 9 mars 2006, 68 ans)
La note : 8 étoiles
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Perle de culture sauvage

Quatrième de couverture :

Jiang Corail Rouge a vingt-huit ans et vit à Pékin avec Zhuzi, comme deux bernard-l'ermite dans une coquille qui n'est pas la leur, au rez-de-chaussée d'un immeuble de vingt-cinq étages. Un jour, un colis reçu par la poste - une énorme anguille séchée - la ramène longtemps en arrière, à l'époque où elle s'appelait Petit Chien et habitait Shitouzhen, la Ville de Pierre, avec ses grands-parents qui ne se parlaient pas. Dans ce petit port de pêche battu par les typhons au sud de la Chine, la mer était redoutable et, tous les soirs, les femmes guettaient sur la plage le retour de leurs maris, ces " mendiants de la mer ". Mais si la petite fille de sept ans n'a jamais oublié la Ville de Pierre, c'est qu'elle y a enfoui en partant un terrible secret et que, dit-elle, rien ne peut se comparer à l'amour et la haine que j'ai éprouvés là-bas.

Cette très belle histoire qui déroule en parallèle le présent de Corail Rouge, avec son Zhuzi qui préfère jouer au frisbee plutôt que travailler, et la plongée dans le courant des souvenirs, nous parle de la Chine d'hier et d'aujourd'hui, des blessures fondatrices de l'enfance et de la confiance en l'avenir. Sa voix se coule à notre oreille, tout près, avec une grâce et une justesse de ton que le traducteur, Claude Payen, a merveilleusement rendues.


Mon commentaire :

Shitouzhen passe pour être l'élément principal de ce roman. Postée en bord de mer, la ville, de son vrai nom Shuiwatang, attend le retour des marins "les mendiants de la mer", la ville protège ses habitants contre les typhons, les dieux et les monstres des légendes.
Dans une petite maison vit "Corail rouge" surnommée "Petit chien" par son grand-père pour éviter que le Roi Dragon de la Mer ne l'emporte au large. Ce sont ces grands-parents qui s’occupent d’elle à défaut d’autre famille vivante.
Il faut avoir une carapace moulée dans du titane pour subir les assauts des hommes.
Un drame se joue sous les yeux des adultes qui restent insensibles comme du marbre.

Élevée à la dure, "Corail rouge" roule, boule entre les pavés tantôt ballottée, tantôt repoussée. Solitaire, elle n’a pas d’autre choix que de se recroqueviller sur elle-même.
L'homme qui tient le rôle de chef de gare, le seul à qui elle peut faire confiance, lui dira : "les enfants qui n'ont pas été gâtés depuis leur naissance, s'en sortent mieux que les autres. Ça les rend plus fort".
Car il en faut une sacrée dose de volonté et d’abnégation pour se construire à Shitouzhen.
C'est ainsi qu'elle deviendra une jeune femme dite "normale" après avoir quittée la ville de pierre. À Běijīng, elle jongle à présent avec les instants de bonheur qui porte le nom de Zhuzi son compagnon, un passionné de frisbee.

Voilà une écrivaine chinoise qui mérite toute mon attention. Au niveau de l’écriture, la construction de son roman ressemble à un scénario bien ordonné. Elle utilise l’analepse (flash-back au cinéma) qui lui permet de raconter deux moments forts de la vie de « Corail rouge ».
L’héroïne est atteinte de synesthésie lorsque les odeurs du poisson, envoyée par un habitant de Shitouzhen, évoquent des images grises de l'enfance.

Guo Xiaolu et Shitouzhen sont à découvrir comme des perles au milieu de l’océan littéraire.

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