Carnets de guerre 1914-1918
de Ernst Jünger

critiqué par JulesRomans, le 7 février 2014
(Nantes - 65 ans)


La note:  étoiles
Pas d'oranges mais des canés
L'ouvrage "Orages d'acier" a repris et a retravaillé complètement le contenu de "Carnets de guerre 1914-1918" qui ont été écrits au jour le jour. Après la guerre ils ont donné lieu à un travail de réécriture. Engagé volontaire à 19 ans, l'auteur a eu une très brève expérience de soldat avec un uniforme français. En effet à 17 ans il a fait une fugue et s'est engagé dans la légion étrangère. Ayant triché sur son âge, car il avait juste 17 ans, il est retrouvé par son père qui le fait exclure de celle-ci.

Incontestablement le narrateur est heureux de faire la guerre et d'être saisi par un certain enivrement meurtrier. Au fur et à mesure que le livre progresse , l'auteur devient plus disert et aux faits assez bruts s'ajoutent des commentaires. Ses sentiments sur le conflit évoluent certes mais très tardivement. Ainsi le 29/8/1916 il écrit encore :

« Il y avait ce matin un office religieux au cours duquel un cureton nous a traités de pauvres hommes brisés et a fait tout pour démoraliser nos gars. Ce genre d'aumônier militaire mériterait qu'on lui crache à la gueule et pas qu'un peu ». (page 247)

Toutefois le 22/7/1918 il s'exprime ainsi

 « Devant un tapis vert, il est facile d'ordonner la conquête d'un bout de tranchée ; dans la sanglante réalité de la guerre, ce genre de bricolage sur une carte se venge immédiatement. Allez donc faire un tour en première ligne, mes beaux messieurs, pour voir comment vous vous en tirerez lorsque le petit vent des explosions vous sifflera un bon coup aux narines ; il y en a d'autres qui sont habitués à ça depuis 4 ans » (pages 540-541).

L'ouvrage permet bien en particulier de se rendre compte des tirs imperturbables de l'artillerie allemande sur les soldats de leur pays (page 544), la joie de s'emparer de diverses choses appartenant à l'armée adverse et en particulier de provisions (page 464). On trouve également des descriptions de villages français sous le feu de l'artillerie allemande (page 249). Les notes sont réellement intéressantes, elles précisent par exemple la portée des canons (page 162).