Le jour de l'amélanchier
de Philippe Marchandise

critiqué par Deashelle, le 28 novembre 2013
(Tervuren - 15 ans)


La note:  étoiles
Tout ce que l’on aime devient fiction…
« Tout ce que l’on aime devient fiction… aux dires d’Amélie Nothomb. Philippe Marchandise vient de publier son premier roman : « Le jour de l’amélanchier ». Un arbre qu’il chérit particulièrement, symbole de pérennité et d’éphémère à la fois. Un arbre qui relie à la fois à la terre et au ciel. Un arbre dont la palette raconte toute saison avec poésie et abrite dans son jardin intérieur les plus beaux chants d’oiseaux. Question musique, la filiation s’inscrit dans celle du grand Cantor Jean-Sébastien Bach. Ce maître de bonheur se transforme au cours du temps de l’accompagnateur tendre et indéfectible, à l’image idéalisée du père. Des racines à la fois terrestres et célestes. Mais que serait tout ceci sans l’attachement profond à une mère qu’il adore? Une mère qui lui est injustement ravie par une funeste maladie de cœur, elle dont le cœur était plus large que la main. Et les fleurs fidèles de cet arbre de vie bruissant d’émotions… c’est la douce compagne, Lisa à qui rien n’échappe, qui contient sa douleur à l’annonce de la terrible sentence médicale qui se répète une fois de plus et qui voit tout avec les yeux du cœur. Une personne attentive, discrète et généreuse.
Mais le pitch, direz-vous ? Prenez la page 56, chiffre fatidique pour Philippe Marchandise et vous saurez tout de l’angoisse, de l’attente cruelle, de la perte des repères, et de celle de l’appétit, hormis celui de VIVRE, lorsque l’on vous annonce la nécessité absolue d’une intervention coronarienne dans la force de l’âge! VIVRE : ce message que l’auteur entend encore de la voix de sa mère qu’il ne cesse de ressusciter par le verbe. Ce message qu’il tente de nous faire entendre lorsqu’après l’épreuve de l’opération vitale il nous invite dans l’intimité de sa lumineuse convalescence. Une convalescence où il va à la recherche de l’essence même de la vie. Où il se relie à la Recherche, celle du grand Marcel. Où il se débarrasse de tout ce qui encombre : «Il te suffit d’éliminer l’inutile, le fatigant, le dérisoire, l’abrutissant, la propagande, les mondanités, l’accessoire, les publicités, le shopping, les graisses, le stress, les collectionnites et les gens intéressés… » Une démarche qui ouvre la voie d’un nouvel art de VIVRE.
Pour Philippe Marchandise il y a aussi tout un cortège de pensées amies qui accompagnent son écriture ainsi que l’amitié véritable, les bonheurs épicuriens de la vie, les esprits du jardin intérieur et extérieur. "Seul le vent sait quelle feuille tombera la première" dit Philippe …Labro, mais Philippe Marchandise a lui décidé de régler ses comptes avec la mort et l’indifférence des milieux hospitaliers dans cette poignante autobiographie.
Et la morale ? Que l’écriture permet de naître ou de renaître. Qu’un roman est à la fois un bébé que l’on voit se déplisser peu à peu sous une plume souvent allitérative construite en partitions qui se berce de mots : du plus rare au plus rémanent. Ah la langue maternelle ! L’écriture est le moyen pour lui de renouer avec l’enfance. L’enfance, la source même de la créativité ; créer, c’est donner des autres yeux aux autres. Par l’écriture il s’évertue à reconstituer le réel : la Vie dont il est fougueusement amoureux et qui devient … fiction. »