Arithmétique des dieux
de Katrina Kalda

critiqué par Yotoga, le 18 juin 2013
( - - ans)


La note:  étoiles
Une auteure à suivre
Ce roman à deux voix propose un parallèle entre la vie de Kadri Raud, une estonienne émigrée en France après la tombée du rideau de fer et celle de Lisbeth, Liisi, une amie de sa grand-mère déportée en Sibérie de 1941 à 1946.

Kadri essaie de comprendre un secret familial, Liisi en apporte les réponses. A travers cette famille estonienne, un morceau d’histoire est dessiné avec les yeux d’une jeune femme actuelle et d’une femme d’âge mur dans les années 40. Toutes deux sont combattantes, toutes deux se battent contre des démons : l’une contre le froid, la faim et l’enfermement, l’autre contre les questions d’identité, les incompréhensions familiales et les insomnies liées.

Pourquoi ce titre ? L’arithmétique des dieux. Parce que toute la famille a des facilités mathématiques, l’un est chimiste, l’autre physicien et mathématicien. Seuls Kadri et son père sont littéraires. Est-ce une biographie ? L’auteure est arrivée en France dans les années 90 et a fait des études de lettres à l’ENS.

Pour avoir fini il n’y a pas longtemps les colombes d’ Oksanen, je ne peux m’empêcher de comparer les deux œuvres qui retracent la même époque estonienne : après l’occupation par les allemands, l’occupation soviétique.

L’identité nationale est traitée dans ce livre en parallèle avec l’identité familiale : comment fait-on partie d’une famille, est-on à sa place dans une nation en étant émigrée ou déportée ? Est-ce que simplement vivre dans cette famille qui nous a accepté fait de nous un membre à part entière comme Johannes ? Est-ce que, pour Liisi, la cohabitation avec le peuple russe dans les goulags peut aboutir à une vie réglée et une intégration réussie ? Comment supporter l’insupportable et reconstruire sa vie en connaissance de cause ?

Le rapprochement avec Oksanen est aussi dû à l’écriture. Le style des deux auteurs est comparable, même si Kalda est beaucoup plus soft, elle utilise les parenthèses dans le passé, les parenthèses du temps qui passe. Entre les deux auteures, seule la maturité et le détachement par rapport à l'Histoire diffèrent. Kalda fera son chemin.