Poésies: (1923-1988)
de Norge

critiqué par Thomas Fors, le 16 mars 2003
(Beloeil - 88 ans)


La note:  étoiles
Aimer ce qui existe
"Tu es belle comme une pomme.
Tes mouvements ont la musculeuse tension d'un piège,
le troublant équilibre d'une algèbre."
(extrait de Investiture, page 26.
Il m'était impossible de ne pas vous présenter cet extrait pour vous plonger immédiatement dans l'ambiance, dans l'écriture de NORGE. Ce poète s'est attaqué à la totalité du vivant, visible ou invisible pour nous ; il va de l'ordinaire à la cupidité, à la sottise, à la cruauté, à la faiblesse ; il aime tout ce qui existe, y compris les oignons...(autrfois ils faisaient rire, nous confie-t-il)
A la lecture, on découvre l'alternance de deux grands courants, l'un ample, exprimé en versets au ton grave, l'autre serré, aux rythmes divers...
Le poète s'engage sur tous les chemins, il explore tout : le doute, la foi, l'obéissance, la révolte, l'ironie, la gravité, l'amour, le rire, les larmes. C'est un homme qui éprouve toutes les figures par la voie du concret. Son rêve : nous offrir une chanson pour chaque moment de notre vie.
L'appétit est sa voie. Il est animé par un "feu central". Il se réclame de Fargue, de Queneau, de Michaux, de Jarry, c'est pourquoi je vous invite à le lire si ce n'est pas encore fait !
Pilules euphorisantes 10 étoiles

J’ai eu le coup de foudre pour Norge dès la première page et voilà beau temps que « Belle saison » « Oignons » et «cerveaux brûlés » occupent une place de choix sur les rayons non pas de ma cuisine mais de ma bibliothèque. Pour moi ses poèmes en prose, toujours brefs, parfois minuscules, sont des pilules euphorisantes. Fables farfelues, d’une imagination sans limite, elles me rappellent André Breton disant de la poésie d’Aimé Césaire qu’elle avait « la beauté de l’oxygène naissant » J’aime chez Norge ce jaillissement qui s’organise ensuite en des phrases très maîtrisées, sans graisse, sans un mot de trop, où ne restent que la saveur des mots et des idées. J’aime aussi cette alliance de logique et d’absurde, comme chez Lewis Caroll ou dans les limericks anglais. Comme Lewis Caroll, Norge est un excellent « maître d’école buissonnière » qui n’a pas oublié le goût des paradis de l’enfance.

Jaillissement et logique absurde mais évidente, voici un de mes préférés, presque une comptine :

Des Œufs

Encore un orage. Mais celui-ci se mit à pondre et Simon trouva de gros œufs noirs dans son bocage. Le premier était plein d’eau, le deuxième souffla du vent, le troisième ne lui donna qu’un sirop poilu, vilain à voir. Du quatrième sortit une ravissante jeune fille soyeuse, blonde, suave et tout. Les autres œufs, dit-elle, étaient gâtés, moi je suis la petite orage.

Malic - - 82 ans - 1 mars 2006


Qui a lu Norge ? 9 étoiles

N'y a-t-il personne qui puisse donner un avis à propos de ce recueil ?
Qu'il a-t-il pas dans la salle un lecteur de poésie ?
Un amoureux de la langue verte ?

"Ne bougez plus, même
Pour baiser leur front,
Comètes."

Peut-être avez-vous peur des famines ?

"Ah, fauchure
Sans hiatus ;
Rasibus,
Les créatures."

Ou bien vos "cerveaux sont-ils brûlés" ?

"Conseils. Ne jetez pas les membres dans la Seine, ça fait des complications. Ne coupez pas le cadavre en morceaux..."

J'aurai fait tout mon possible pour vous amener à lire NOREGE !

MOPP - - 87 ans - 3 avril 2005