Les dossiers secrets de la Grande Guerre
de Philippe Valode

critiqué par JulesRomans, le 26 mai 2013
(Nantes - 66 ans)


La note:  étoiles
Des secrets de Polichinelle plus dans le tiroir que dans l'armoire
Ce livre a un titre qui ne tient pas ces promesses, il n’y a pas de secrets et il n’y a pas de dossiers. Heureusement encore qu’on parle de la Grande Guerre de 1914-18 car, cerise sur le gâteau, on aurait pu parler d’autres conflits appelés aussi "Grande Guerre" (nos amis d’Amérique latine voient de quoi je parle).

C’est fort dommage car ce livre est réellement intéressant puisqu’il apporte une synthèse sur les principales questions que l’on peut se poser autour de la Première Guerre mondiale. Toutefois il n’y a eu aucun travail en archives, le récit s’appuie sur environ soixante-dix titres pratiquement tous écrits dans le dernier tiers du XXe siècle et les dix premières années du XXIe siècle (et des articles d'une seule revue), ce sont donc des livres assez facilement disponibles à l’achat lorsque sort " Les dossiers secrets de la Grande Guerre".

Le point fait sur chaque sujet révèle une connaissance sérieuse de la question, aucun scoop ou révélations douteuses à la Franck Ferrand, on est dans le consensuel. Ceci ne veut pas dire bien sûr que l’on ne revient pas sur les discours de l’histoire officielle pour élèves d’avant les années 1970. Bien qu’aucune question ne traite spécifiquement de Joffre, il est sérieusement égratigné à travers l’ensemble du deuxième chapitre qui couvre environ trente pages. Rappelons à ce sujet qu’est sorti un livre sur ce maréchal de France intitulé "Joffre, L’âne qui commandait des lions", fruit d’un travail sur archives ; c’est un titre d’ailleurs non cité dans la bibliographie des "Dossiers secrets de la Grande Guerre" vraisemblablement parce que le contenu est un procès à charge.

Parfois les limites de la place impartie ou le rejet de ce qui apparaît secondaire fait que l’on n’apporte pas de réponse à une question que le lecteur va se poser sur le sujet. Ainsi le chapitre XVI (le plus court de l’ouvrage) fait deux pages et demie de texte, il y avait donc moyen d’expliquer (en utilisant la demi-page restante de blanc) pourquoi on appelle espagnole une grippe partie de Chine et qui nous est venue des Amériques. C’est une affaire liée à un problème de censure qui a bien des points communs avec le nuage de Tchernobyl. En effet comme ce dernier les effets de cette grippe s’arrêtaient à la frontière. Les journaux français pouvaient signaler, en cet automne 1918, les malheurs qu’elle causait en Espagne mais pas sur le sol français.

Les chapitres sont thématiques tout en tenant compte de la chronologie : l’usage des gaz ou l’apport des colonies françaises ou britanniques y précède évidemment la décisive intervention américaine. On voit rappeler là le rôle de Saint-Nazaire comme point de débarquement, mais pas celui du camp américain dans le Loir-et-Cher, lieu de l’action pour "Un frère d’Amérique : 1917-1919" de Philippe Barbeau et Christian Couty.