Un amour empoulaillé
de Guy Lalancette

critiqué par Libris québécis, le 2 mai 2013
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
L'amour en région
Saint-Blaise est un village de la Montérégie (sud de Montréal). La promiscuité regroupe ses 2000 habitants autour de la vieille église construite en 1893. Un vase clos qui transforme toute vie privée en secret de Polichinelle. L’emmurement s’exprime à travers des lieux fermés propices aux drames villageois, tels que l’asile, le juvénat des frères et le poulailler évoqué par le titre. C’est un exploit que d’affronter ceux qui sont embusqués derrière des murs, qui ont des oreilles et des langues de vipère. Et si le cœur du damoiseau bat la chamade pour la demoiselle, il court à sa perte.

Quand Éros s’amène avec son air enfantin, Élisabeth devra se tenir sur ses gardes pour recevoir l’hommage de Simon, un éphèbe troublé par ses appas. On survit difficilement aux amours frappées par l’index du pouvoir ecclésiastique, conféré à l’auguste curé Pisson de Saint-Blaise. Si la population se tient les fesses serrées, il ne faut pas croire qu’elle vit à l’abri du pire. Le plaisir de salir ne sait défaillir. Peu importe l’exil d’infortune choisi, en l’occurrence un poulailler, pour répondre en toute liberté aux appels du cœur, viols ou bourrades attendent ceux qui se sont soustraits aux normes sociales, à moins de privilégier le suicide. Sous cet aspect, on se croirait dans un pays du Moyen Orient.

En somme, Guy Lalancette s’indigne de l’abjection qu’alimente souvent une géographie réduite à l’ombre d’un clocher. L’écriture, peaufinée, recourt à l’humour afin d’offrir une soupape à la douleur du narrateur. Ce roman, trop bavard cependant, approfondit, avec empathie, une adolescence vécue dans l’eau sale de nos saints villages.