Neuf mois
de Anne Bonhomme

critiqué par Libris québécis, le 1 avril 2013
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Du berceau au tombeau
Chaque jour éloigne du berceau et rapproche du tombeau. Pour des parents éventuels, ce n’est pas une évidence que de déposer le fruit de leur amour dans un moïse. L'enfant se laisse attendre, voire même il périt avant même de voir le jour. Ce sont les fausses couches à répétition qui attendent certaines femmes incapables de mener leurs grossesses à terme Ce sont des « malchanceuses » selon la conclusion des médecins perplexes devant les mystères de la vie.

C’est le cas de l’héroïne du roman. Isabelle compte déjà trois fausses couches à son actif alors que son désir le plus profond, c’est de donner la vie. Déception abyssale ! La vie est bien mal emmanchée. Mais un jour, enceinte pour une quatrième fois, elle espère que cette fois-ci sera la bonne. L’obsession de la couche couche mine son plaisir de jouir de sa future maternité. Le moindre signe anormal qui convoie sa grossesse porte ses craintes au paroxysme. Une échographie n’attend pas l’autre. Même si le résultat est toujours heureux, le ne sait-on jamais joue au rabat-joie. L’enfant tant attendue provoque la panique si, un instant, elle se repose de taper du pied sur les parois de l’utérus de sa mère.

Anne Bonhomme décrit à merveille les angoisses d’Isabelle. Les paroles de réconfort de la part de son mari et de sa mère restent stériles. Il est impossible de rassurer une âme obsédée. Au contraire, les bons mots l’excèdent surtout que l’héroïne est une « control freak ». Elle aime bien diriger les sentiments à adopter à son égard, soit de craindre, comme elle, la fatalité. Seule Rose, sa vieille voisine, l’apaise quand elles se rencontrent dans un parc montréalais, qui longe la rivière des Prairies pour y nourrir les canards. Un lien très fort d’amitié naît de leurs échanges. Échanges qui conduisent vers la vie pour l’une et la mort pour l’autre, chacune s’aidant à franchir le cap qu’elles s’apprêtent à contourner.

Ce n’est pas un roman à jeter par terre. Mais c’est intéressant de scruter la peur de l’échec et, surtout, son corollaire qui oblige autrui à partager les mêmes sentiments. Également intéressant de suivre deux parcours qui lient la nativité et la mortalité dans un même souffle.