L'effroyable imposture du rap de Mathias Cardet

L'effroyable imposture du rap de Mathias Cardet

Catégorie(s) : Arts, loisir, vie pratique => Musique

Critiqué par Antihuman, le 3 mars 2013 (Paris, Inscrit le 5 octobre 2011, 40 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (24 202ème position).
Visites : 5 575 

A lire d'urgence

Résumé

Au vu du succès mondial de cette musique, à ce jour la plus écoutée à travers le monde, cet essai critique s'efforce de retracer ce long processus de domination à travers les 40 dernières années et d'exposer ses terribles conséquences sur le tissu populaire : appauvrissement du langage, donc de la pensée, machisme, glorification de la culture ghetto de type U.S. (culte des armes, de la prison, de la consommation de stupéfiants, de la violence verbale), « automythification » d'une jeunesse immigrée conduisant à une victimisation perpétuelle, et à la division des quartiers populaires : les immigrés d'un côté, les « desouche » de l'autre, et les femmes au milieu. Une « déconscientisation » politique à travers l'apologie de l'ultralibéralisme et du darwinisme sociétal amenant logiquement à l'atomisation de l'individu et au « chacun pour sa gueule », soit la fin de la nation et son glissement vers une société d'hyperconsommation.

Loin de s'arrêter à une simple description d'un défilé de marques de sportwear - d'ailleurs très curieux pour des rebelles affirmés -, ce livre tente d'analyser et d'expliquer ce processus, tout en ne taisant pas le rôle sombre des principaux bénéficiaires du rap, qui s'avèrent en être aussi les principaux instigateurs : pour des raisons économiques, mais aussi, et c'est le plus inquiétant, pour des raisons idéologiques.



MON AVIS

Selon moi si un dicton en particulier s'applique très bien à l'actualité récente c'est bien "chacun ses goûts", or la mainmise scandaleuse du rap et de ce R'N'B frelaté sur les radios françaises, ainsi que parmi les divers médias, ne le permet en aucun point et va donc évidemment contre toute démocratie, ainsi qu'à l'inverse contre cette variété salutaire de tout temps des arts en général. Il y a du bon, et du moins bon, ceci est aussi vrai, mais vouloir imposer en armada un seul et unique genre de musique comme référence ultime est absolument grotesque sinon ridicule (puis nous remarquerons d'ailleurs, in fine, très digne de la soigneuse désinformation pratiquée autrefois en ex-RDA...) Et surtout vu du fait qu'il s'agit bien souvent du pire des refrains appartenant à la base à ce groove originel au pauvre rythme binaire, que l'on doit subir coûte que coûte chaque jour chaque nuit à l'aide de notre tuner personnel ou non. Cessons bien vite tout cela, quant à la rébellion elle ne s'applique pas qu'à un seul groupe ethnique de personnes !

Sans compter que ces faits sont très dangereux pour la culture à venir ou son enrichissement éventuel, il faudrait peut-être également mentionner que les majors comprennent désormais de moins en moins de risques, surtout en France, afin de produire des nouveaux groupes - le court terme ainsi que l'anglomanie sans saveur et de type "U.S." étant de toute façon le plus souvent favorisés en premier lieu. Voilà, j'espère avoir contribué en toute modestie à la promotion de ce bouquin de première nécessité. Et non aux chouchous du show-biz.

Connectez vous pour ajouter ce livre dans une liste ou dans votre biblio.

Les éditions

»Enregistrez-vous pour ajouter une édition

Les livres liés

Pas de série ou de livres liés.   Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série

Du bruit qui ne pense pas…

6 étoiles

Critique de CC.RIDER (, Inscrit le 31 octobre 2005, 65 ans) - 12 février 2023

Né au milieu des années 70 dans les ghettos noirs new-yorkais, le rap (signifiant entre autres « Rage against the police ») va rapidement s’imposer outre Atlantique comme le courant musical principal de la contestation. Dès les années 80, il envahit l’ensemble du territoire des Etats-Unis puis peu à peu celui de l’Europe en commençant par les banlieues défavorisées. Il devient le porte-parole des « sans-voix » qui peuvent enfin exprimer leur mal-être, leurs frustrations et leur rejet du système. Dans les années 90, il évolue en « gangsta rap », glorifiant les bienfaits des drogues, le bling-bling avec les grosses chaînes en or, les pétasses court-vêtues et les tueurs de flics. En ce qui concerne la France, ce sont quelques personnes branchées comme Bernard Zakri, correspondant à New-York du magazine « Actuel », Laurence Touitou, architecte et Sophie Bramly, photographe, qui l'importèrent et en firent la promotion. Ils passèrent le relais à Alain Maneval (Europe 1, émission « Pogo » et TF1 « Mégahertz ») qui commença à en diffuser sur les ondes croyant voir dans ce style musical un prolongement du mouvement « punk ». Une première tournée « Zulu Nation » fut un échec, le public préférant à l'époque le « rock steady ». Le succès finit par arriver en 1984 avec l’émission de télé « Hip-hop », NTM, IAM et autres Ministère Amer. Le rôle de Jack Lang, Jean-Paul Gaultier, SOS Racisme et Malek Boutih ne fut pas négligeable non plus…
« L’effroyable imposture du rap » est un essai sur un courant musical qui prédomina pendant plus de quarante années. Une incroyable longévité pour de la pseudo-poésie accompagnée de quelques riffs et scratchs de synthés, « rap » signifiant également « bavarder sur un fond rythmique » en argot noir américain. Si l’auteur, qui en fut grand fan avant de s’en éloigner, démonte bien le mécanisme de lancement d’un produit de consommation courante comme n’importe quelle lessive, s’il prouve que le but de l’opération était surtout de « calmer » les ghettos et ici les « banlieues » en y adjoignant une bonne dose de shit et qu’au bout du bout, que cette fausse « révolte » s’est terminée en consommation à outrance (basket, fringues, etc.) et donc en profits énormes pour ceux qui ont su en faire un bon filon (la fortune de Booba est évaluée à 40 à 60 millions de dollars), on se demande en quoi c’est plus une imposture que tout le reste et en quoi elle est effroyable, la récupération tout comme la marchandisation de tout et de n’importe quoi étant le principe même du capitalisme. Ouvrage intéressant si l’on veut s’informer sur les dessous de cette affaire, mais qui laisse un peu sur sa faim en raison de son titre racoleur.

Wesh ! CQFD.

9 étoiles

Critique de Hexagone (, Inscrit le 22 juillet 2006, 53 ans) - 30 septembre 2018

Je suis un amateur de musique que l'on peut qualifier d'aviser sans paraître présomptueux. Je connais assez bien différends style en passant du classique, au jazz, au rock, au métal, à la fusion, l'électro, j'écoute à peu près tout sauf du RAP. Je suis allergique aux rythmes, aux paroles scandées et au marketing qui gravite autour. Mais je ne veux pas mourir idiot et je consent à essayer de comprendre. Il est évident que ma critique va souffrir de deux tares, premièrement mon manque d'objectivité et secondement le fait que le livre soit édité par Kontre Kulture la maison d'édition de Soral. Mais allons-y quand même. C'est un livre qui se lit rapidement, en une journée pour moi soit environ trois heures. Il est bien construit , bien écrit et relate l'essentiel de l'histoire du genre. Des premières luttes des noirs américains, en passant par la récupération par le FBI, la gauche américaine puis par la gauche caviar bourgeoise française. D'une forme d'expression populaire ethniquement marqué, le rap est devenu la musique la plus écoutée et donc la plus vendue au monde, et ce n'est pas inutile de le dire car il y a un max de pognon à se faire et les grandes marques l'ont bien compris. C'est Adidas la première qui va utiliser la crédulité des rappeur et de leur public pour se faire une pub monstre pour presque rien. Les autres suivront, le marketing emboîtera le pas. De la Zulu Nation à J-Zay il y a un grand écart que les petits malins ont fait faire au rap en s'enrichissant. Lutte de classe, hédonisme, drogue, bling-bling et gansta rap, la boucle est bouclée. Pour la France, c'est deux femmes françaises exilées à New-York, fréquentant les boîtes branchées qui vont via Actuel, le magazine de la gauche bourgeoise libertaire hédoniste qui va introduire le RAP dans notre pays. LA gauche va l'utiliser pour se rapprocher de la population des banlieues qui ne s'intéressent aucunement à la politique ce cela via SOS racisme. C'est à partir de là que cette population va se faire baiser, une fois de plus. Récupéré par l'intelligenstia parisienne, le RAP avec NTM dont les membres sont cornaqués par… Jean-Paul Gauthier, c'est dire la crédibilité d'une Joey Starr qui après avoir craché sur la police, tourne dans des films de flics. Le RAP français est la pâle copie du rap américainet qui se voit décliner en gansta rap, véhiculant le sexisme, les femmes sont des chiennes, le consumérisme, grosses voitures et billets, la toxicomanie avec le joint qu'il faut faire tourner. L'empire étant ce qu'il est il a su créer des contre-courants avec des rappeurs intello. Mais le fonds de commerce c'est Sky Rock qui l'entretient. La population des banlieues s'est fait rouler dans la farine et n'a pas su, par manque de clairvoyance ou d'intelligence, s'accaparer un mode de contestation en créant une troisième voix. La voix de la sagesse, de l'intégration, de la réconciliation comme dit Soral. Au lieu de cela on voit des jeunes qui se ressemblent tous car ils ont les mêmes codes, se noient dans le nihilisme rythmés par des samples d'une pauvreté artistiques proche de zéro. Pas beaucoup d'alternatives, ou tu réussis en faisant le buzz car ton espérance de vie artistique est très courte, ou tu subis les règles que t'impose le marketing et du rames en dealant pour tenter de t'acheter ce que te fais miroiter l'empire. Bref, le jeune de banlieue à deux possibilités, être le négro ou l'arabe de cité ou le bounty de service, pas beaucoup d'échappatoires. Le livre porte mal son nom, il devrait s'intituler l'Effroyable escroquerie du RAP. On peut voir que derrière tout ces mouvements de jeunesse, flower-power, rap, il y a toujours les mêmes personnes, celles qui gravitent autour de la politique, de la mafia, des influenceurs bien connus comme les Attali et consorts. D'un mouvement qui se voulait libre, les rappeurs sont au final comme les souris dans leur cage et font tourner comme des idiots, non pas la roue, mais la machine à cash, cela en bernant des jeunes éblouis par les éclats des chaînes en or qui brillent. Un très bon livre que je conseille vivement.

Forums: L'effroyable imposture du rap

Il n'y a pas encore de discussion autour de "L'effroyable imposture du rap".