Le renard et le hérisson : Comment combler le fossé entre la science et les humanités de Stephen Jay Gould

Le renard et le hérisson : Comment combler le fossé entre la science et les humanités de Stephen Jay Gould
(The hedgehog, the fox and the magister's pox)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Scientifiques , Sciences humaines et exactes => Critiques et histoire littéraire , Sciences humaines et exactes => Essais

Critiqué par Elya, le 26 janvier 2013 (Savoie, Inscrite le 22 février 2009, 34 ans)
La note : 7 étoiles
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Réunir les "sciences" et les "humanités" ; noble enjeu

Après m’être exaltée de La mal mesure de l’homme, j’estimais que les œuvres de Stephen Jay Gould devaient toutes être de la même pertinence. Le renard et le hérisson conserve le caractère particulier des essais de SJ Gould : un assemblage d’histoire et de science.

Cette dernière, bien que pouvant être considérée comme une expression de son contexte social, n’en est pas un moins un moyen d’acquérir des connaissances plus fines sur la nature. Tout l’enjeu de ce livre, auquel j’adhère pleinement, consiste à quitter la vision caricaturale, illogique et itérative de l’histoire, consistant à tout opposer de manière dichotomique : nature et culture, sciences et religion (pour cet aspect, voir plutôt Et Dieu dit : « Que Darwin soit ! » de SJ Gould), bien et mal… Rien dans l’histoire du monde ne justifie ces oppositions, bien que chaque siècle remette au goût du jour ces divisions.

Partant de la métaphore d’Erasme du hérisson et du renard, s’appuyant sur des aphorismes de célèbres noms du 16ème au 20ème siècle, et illustrant le tout à l’aide d’extraits d’ouvrages peu connus de livres anciens de sa propre collection, SJ Gould nous livre SA vision du lien entre sciences et humanités.

Il rejette la vision caricaturale de la « lutte » entre les Anciens et les Modernes (Renaissance), de la révolution scientifique (16ème et 17ème), ou encore du conflit injustifié entre réalistes et relativistes. Chaque parti extrême caricature l’autre, dans l’optique où il dénierait lui accorder une pensée. SJ Gould signale que nombre de chercheurs n’ont jamais lu d’histoire ou de philosophie des sciences (affirmation qui serait facile à démontrer). Certains écrivains comme Claude Lévi Strauss auquel il renvoie ont tenté d’expliquer cette tendance à la classification dichotomique comme émanant de l’évolution, comme un outil cognitif de base pour ordonner la complexité de la nature et de la culture.

J’ai apprécié sa critique de la prose des scientifiques, se bornant à l’utilisation du passif, à l’absence d’ornements, nécessaires selon leur code pour que le contenu factuel ne soit pas amoindri. SJ Gould soulève au contraire l’importance du style. Il cite Charles Lyell (géologue) et Freud comme très bons exemples de personnages dont la forme de leur style a pu compenser la légèreté de leur fond (ou leur lourdeur pseudo-scientifique). Dommage que SJ Gould n’appartienne pas à cette seconde catégorie ; sa prose est ordinaire.

Ses définitions du mythe de l’objectivité (« croyance selon laquelle les scientifiques sont capables de se libérer des contraintes sociales et préjugés pour accéder directement à la nature selon les canons de la méthode scientifique »), de la contingence (des faits imprévisibles (comme un évènement historique) que l’on peut analyser une fois passé) et de l’émergence (interaction révélée à un seul niveau de complexité d’un phénomène) sont également intéressantes.

Il est finalement difficile de tirer de ces propos une conclusion originale et pratique. SJ Gould parle de « consilience », un joli mot mais qui n’a rien de concret.

Il faut accepter qu’un fait affirmé par les sciences a un degré de confiance plus important qu’une solution éthique correcte ; mais garder en tête que l’importance d’une solution éthique est supérieure. Voilà une des idées sur laquelle SJ Gould conclut. Je trouve cela dommage d’avoir parcouru 300 pages pour ne garder en tête que des opinions de ce type.

Si l’on veut apprécier Le renard et le hérisson, il faut sans doute garder en tête qu’il s’agit avant tout de la vision de l’auteur sur deux thématiques qui lui sont chères (et qu’il regretterait de nous voir opposer), les sciences et les arts. Un témoignage plein d’érudition sur certains personnages oubliés de l’histoire, et sur d’autres dont le nom nous est forcément familier, mais fourmillant d’anecdotes, d’images et d’illustrations d’une grande diversité.

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Les éditions

  • Le renard et le hérisson [Texte imprimé], comment combler le fossé entre la science et les humanités Stephen Jay Gould traduit de l'anglais (États-Unis) par Nicolas Witkowski
    de Gould, Stephen Jay Witkowski, Nicolas (Traducteur)
    Seuil / Science ouverte.
    ISBN : 9782020614702 ; 21,30 € ; 14/10/2005 ; 364 p. ; Broché
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