Le poids des secrets, Tome 3: Tsubame
de Aki Shimazaki

critiqué par Libris québécis, le 18 janvier 2003
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Le Racisme des Japonais à l'égard des Coréens
Aki Shimazaki est une Japonaise qui habite à Montréal. Tsubame, écrit directement en français, est la troisième oeuvre qu'elle consacre à son pays d'origine.
Le titre évoque une hirondelle. A cet oiseau s'ajoutent des daikons (radis blancs) et des kimchi (des légumes marinés). Ce vocabulaire plonge le lecteur dans un univers tout asiatique.
Dans ce roman, elle souligne le racisme des Nippons envers les Coréens. L'action se situe en 1923, au moment de la colonisation de la Corée par le Japon. Plusieurs indépendantistes de la Corée ont fui vers le pays du colonisateur. Après le tremblement de terre qui a secoué Tokyo, ces réfugiés cachaient leur identité pour échapper aux purges pratiquées par les civils qui les tenaient responsables du séisme. Il en fut ainsi de l'héroïne, qui confiera sa fille à un orphelinat tenu par un prêtre européen afin de la sauver de ce péril.
Ce moment de l'histoire montre encore une fois de plus que Plaute avait raison d'écrire «homo homini lupus». Cette extermination est rendue avec la délicatesse de l'Asiatique. Tout est en douceur. L'agressivité est refoulée dans un non-dit qui, comme certains silences, est éloquent. Ca donne évidemment une oeuvre dépouillée, davantage apparentée à une nouvelle qu'à un roman. Elle en a d'ailleurs la caractéristique puisque l'auteur a le sens de la chute inattendue.
comme un vol d'hirondelles 10 étoiles

En 1982, Mariko, grand-mère de trois petits-enfants, vit chez son fils Yukio et sa femme Shizuko. Elle se remémore son enfance, lorsqu’elle a échappé au tremblement de terre ayant ravagé Tokyo en 1923 et causé la mort de centaines de milliers de personnes. Grâce à la prévoyance de sa mère, originaire de Corée, alors occupée par les troupes japonaises, Mariko a échappé au massacre des coréens, accusés de tous les maux dans la furie xénophobe ayant suivi le séisme. Personne de sa famille, elle qui a épousé le digne représentant d’une des lignées les plus "respectables" du Japon, ne connaît ses origines, le prêtre qui l’avait recueillie l’ayant habilement dotée d’un nom et d’un prénom typiquement japonais. Un roman sur le déracinement et la quête des origines, mettant en scène des personnages que l’on retrouve à divers âges au long des cinq tomes qui forment la saga familiale du "Temps des secrets". Comme dans les autres volumes de la série, on apprend au passage beaucoup de choses sur l’histoire du Japon au vingtième siècle, ce siècle tourmenté qui a vu basculer ce pays de la féodalité à l’ère du numérique.

Jfp - La Selle en Hermoy (Loiret) - 75 ans - 10 décembre 2022


HIRONDELLE 8 étoiles

Après l’histoire de Yukio le fils (qui nous est racontée dans Hamaguri, le deuxième volume de cette pentalogie), c’est l’histoire de sa mère, Mariko Kanazawa que nous découvrons dans Tsubame.
Comme tous les personnages de cette saga familiale celle-ci cache un secret au reste de sa famille (attention spoiler !), ici en l’occurrence le fait qu’elle est une enfant naturelle, née d’une mère coréenne émigrée au Japon et que son véritable nom est Yonhi Kim.

Encore une fois, l’écrivain reprend ici les thèmes classiques de la littérature japonaise, déjà développés dans les volumes précédents, comme p. ex. le poids des traditions, la place de la femme dans la société japonaise, mais aussi certains de ses canons : la nature, l’eau, les bois, les oiseaux etc…

Brièveté, dépouillement, minimalisme et sobriété de l’écriture sont, encore une fois, les meilleurs mots pour décrire le style incroyable de beauté de l’écrivain canadien. Une écriture comme un poème, toute en douces courbes, sans aucune aspérité, sans aucun mot plus violent que l'autre, comme une conversation qui vous serait murmurée à l'oreille!...

S’y ajoutent dans ce volume une bonne dose de mélancolie et une pincée de mysticisme. Pour aimer l’écriture de SHIMAZAKI, il faut accepter que des phrases, comme celle-ci : « Les cosmos sont maintenant immobiles. Mon regard se fixe sur les fleurs : rose foncé, rose pâle, rose presque blanc. Ce jour-là aussi, lorsque ma mère a disparu, les cosmos étaient épanouis. Je ferme les yeux. Je vois l’image de ma mère superposée à celle des fleurs. », vous semblent tout à fait logiques et normales… Un peu comme on le fait quand on lit un roman du grand écrivain japonais Haruki MURAKAMI...

Une fois cela acquis, l’écriture se découvre à vous comme jamais… Et alors, là, on ne peut qu’aimer, et se laisser prendre, que dis-je piéger, happer, phagocyter, par cette très belle écriture… Et ça y est, c’est fait, vous êtes un « fan » de Mme. Aki SHIMAZAKI, comme, mais cela vous l’avez sans doute déjà compris… Moi !.

Septularisen - Luxembourg - 56 ans - 24 février 2015


Tragédie familiale pentalogie tome 3 10 étoiles

« Tsubame » qui signifie hirondelle en japonais, nous rencontrons Yonhi Kim, elle a 12 ans et vit avec sa mère qui a fui avec son frère la Corée parce qu’ils avaient pris part au mouvement d’indépendance.
Le 1er septembre 1923 a lieu le terrible tremblement de terre du Kanto, profitant de la panique, les japonais tentent de tuer les Coréens présent au Japon. Afin de sauver Yonhi, sa mère va la confier à un prêtre et elle part à la recherche de son frère, elle ne reviendra jamais. Yonhi Kim sera rebaptisée Mariko Kanazawa.
Cette fois, l’auteur est plus dans l’exil, la perte de l’identité, elle mêle toujours l’Histoire dramatique du Japon, toujours aussi remarquable.

Dudule - Orléans - - ans - 23 mars 2011


toujours aussi réussi 9 étoiles

Qu'ajouter à la très juste critique de Libris Québécis . Tsubame est le troisième volume de la pentalogie du poids des secrets.
Au début, rien ne permet de raccrocher ce tome aux deux précédents, Tsubaki et Hamaguri, l’histoire paraît totalement indépendante.
En 1923, Yonhi a tout juste 12 ans. Ses parents, poursuivis pour leur activité indépendantiste, fuient la Corée au moment de la colonisation japonaise, et s’installent à Tokyo. Yonhi vit désormais seule avec sa mère (son père aurait disparu avant sa naissance) et elle ne va toujours pas à l’école, elle étudie à la maison. Le 1er septembre 1923 a lieu le terrible tremblement de terre du Kanto, qui fit 100 000 morts, 40 000 disparus et plus de 100 000 blessés, et détruisit les villes de Tokyo et Yokohoma. Profitant de la panique, les Japonais tentent de tuer tous les Coréens présents sur leur territoire. Pour sauver sa fille, sa mère la confie à un prêtre (surnommé Tsubame) qui protège d’autres orphelins dans son église. Partie à la recherche de son oncle, elle ne reviendra jamais. Rebaptisée Mariko Kanazawa, elle se fond peu à peu dans une nationalité japonaise.
La deuxième partie du livre se déroule 59 ans plus tard, Yonhi/Mariko vit avec son fils Yukio et ses trois petits enfants, dont la petite Tsubaki. Le lien est fait avec les tomes précédents !
Une exhumation des corps des Coréens tués lors du tremblement de terre est prévue, et Mariko (veuve Takahashi), s’y rend. De rencontre en rencontre, elle revisite ses souvenirs et les lourds secrets de son passé.
Un court volume très réussi, toujours dans le minimalisme mais d’une grande force évocatrice. Cette partie de l’histoire (avec un petit et avec un grand H) est intéressante et me donne encore plus envie de découvrir les autres volumes.

Laure256 - - 51 ans - 9 juin 2007