La guérison du monde
de Frédéric Lenoir

critiqué par Elya, le 18 janvier 2013
(Savoie - 34 ans)


La note:  étoiles
Rares notions intéressantes noyées dans des propos conventionnels et une vision archaïque de la science
Frédérique Lenoir écrit régulièrement des « essais » portant sur la spiritualité et les religions.

J’ai reçu La guérison du monde comme un témoignage sur sa vision du XXIème siècle, « en déclin ». La « crise » touche tous les domaines : économie, environnement, relations humaines, santé… en cela, il la définit comme systémique. Il considère que le monde a plus changé ces 100 dernières années que durant la période qui s’est écoulée entre le début du XXème siècle et le monde antique (soit des milliers d'années). Je trouve cette idée un peu farfelue, tout dépend du référentiel dans lequel on se situe.

Dans la même optique, il estime que nous vivons une seconde révolution, succédant à celle qui a séparé le paléolithique du néolithique. Chris Harman dans l’Histoire populaire de l’Humanité réduisait aussi l’histoire à la révolution engendrée par l’apparition des classes. Sauf que ce dernier argumentait son propos avec de nombreuses références envers des documents historiques.

Ce qui ne semble pas le cas de F Lenoir qui non seulement apporte de nombreuses informations sans citer ses sources ( par exemple, en 1800, 3% d’humains vivaient en ville), mais en plus énonce des choses totalement fausses, qui vont à l’encontre de ce qui est admis par les spécialistes : selon lui, les « hommes préhistoriques » habitaient dans des grottes. Ce n’est pas ce qui fait consensus chez les paléoanthropologues, qui précisent depuis de nombreuses années que les hommes les occupaient très peu, contrairement à l’idée encore bien répandue dans le grand public (se référer par exemple aux ouvrages de Pascal Picq, Les origines de l'homme expliquées à nos petits-enfants).

Il procède à peu près de la même façon lorsqu’il accuse le « réductionnisme » scientifique de considérer la conscience comme seulement un ensemble de neurones. Lire Damasio (L’erreur de Descartes ) lui serait salutaire, tant l’auteur, comme l’ensemble de la communauté neuroscientifique, insiste longuement sur l’importance de l’interaction avec l’environnement dans toutes les tâches cognitives. En fait, la vision de la science de F Lenoir correspond à celle de Descartes (17ème siècle) . On se doute que depuis cette époque, l’épistémologie a évolué.


On pourrait relever comme ceci toutes les inexactitudes et aberrations de l’auteur. Mais on peut aussi se contenter de noter les quelques éléments positifs de cette lecture, plus que consensuelle.

On pourra apprécier par exemple le passage qui fait le point sur les valeurs transversales à tous les courants religieux et spirituels : amour, vérité, justice, respect de l’autre... La présentation de quelques initiatives « par le bas » (les services d’échanges locaux, l’agriculture raisonnée de Pierre Rabbi notamment) plairont sans doute, bien que de nombreux livres aient déjà abordé le sujet, et de manière moins superficielle (pour les initiatives locales : Comment sortir de la société de consommation du Worldwatch Institut, pour le modèle du bas vers le haut : De l’inégalité parmi les sociétés de Jared Diamond).

Je ne vois pas trop en quoi ce livre se distingue de beaucoup d’autres du même genre, de la vague New Age. C’est facile à lire, ça ne chamboule pas trop nos opinions, bien que s’imaginant novateur.

Plus néfaste, il diffuse une conception erronée et archaïque de la science, qui n'est défendue par plus aucun scientifique digne de ce nom, à savoir celle du réductionnisme (philosophie ancienne qui tentait d'expliquer des phénomènes complexes en grande partie dirigés par le hasard par le comportement déterministe d'éléments constitutifs - je paraphrase S Jay Gould dans La mal-mesure de l'homme). Sans compter que Frédérique Lenoir use aussi de ce réductionnisme lorsqu'il distingue maintes fois l'"Orient" de l'"Occident", comme si le monde pouvait se réduire à cette dichotomie.
La fin du monde est-elle programmée ? 5 étoiles

Ce bouquin assez récent n’a pas trouvé beaucoup d’écho chez les lecteurs de CL. Il est d’ailleurs aussi resté dans ma bibliothèque pendant deux ans, et malgré quelques tentatives de le démarrer, je n’avais jamais été au-delà de la page 30. J’ai finalement fait l’effort de m’y plonger et de le terminer.
L’auteur commence par énumérer les différents soucis que la planète a ou va bientôt avoir.
Frédéric Lenoir oscille entre d’abord un pessimisme alarmiste et un enfonçage de portes ouvertes et ensuite un catalogue de solutions pour guérir le monde grâce à une série de bonnes âmes titulaires de diplômes en tout genre et souvent ouvertement altermondialistes.

Je suis personnellement assez sensible aux questions d’environnement et je ne prétends pas qu’il ne faut pas écrire ce type de livres qui ont le mérite d’exister, mais cela reste une lecture assez peu réjouissante et trop listée pour dire qu’on peut en tirer de grandes lignes cohérentes.
Par ailleurs, l’auteur use parfois d’une terminologie un peu trop élaborée et mélange science et philosophie sans que la mixtion soit parfaitement cohérente.

On va donc dire qu’il s’agit peut-être d’une lecture utile, mais cela reste un salmigondis peu passionnant.

Pacmann - Tamise - 59 ans - 15 décembre 2016