Un jour le vieux hangar sera emporté par la débâcle
de Robert Lalonde

critiqué par Dirlandaise, le 13 décembre 2012
(Québec - 68 ans)


La note:  étoiles
Un jour, tu ouvriras les yeux
Un jeune homme tourmenté effectue une retraite dans un monastère afin de faire le point sur sa vie et tenter d’exorciser ses démons intérieurs. Il y fait la rencontre de Clément qui lui conseille d’écrire afin de se libérer de ses angoisses et ainsi pouvoir continuer à vivre et devenir un adulte dans toute la plénitude de son être. Notre héros couche donc sur le papier une foule d’expériences d’enfance et de jeunesse mais ce sont surtout les personnes qui l’ont marqué et ont joué un rôle dans sa vie qui ne tardent pas à prendre toute la place et à ressurgir du passé, tel des fantômes : Stanley l’Indien, Éloi le fossoyeur, Serge le petit bourgeois abandonné de ses parents voyageurs, Claire sa cousine, Delphine, le père Arcos et plusieurs autres. Il y a aussi une outarde baptisée Alma adoptée par l’enfant et dont la mort tragique a brisé le cœur fragile qui battait pour elle. Cette écriture libère le jeune homme et lui permet d’émerger de son cocon pour mieux prendre son envol, accompagné de Clément, le fidèle ami tant apprécié.

Beau roman sur le difficile passage de l’enfance à l’adolescence puis l’âge adulte. La belle écriture de Robert Lalonde dépeint un monde dont la faune et la flore québécoises constituent la toile de fond. La plume de l’auteur possède une magie créatrice et une poésie d’une beauté incomparable. Le lire est un véritable enchantement.

« J’avais mis, comme chaque fois, la soutane à sécher sur deux branches piquées dans le sable. Elle était raide comme la chasuble qu’il endossait pour dire la messe. Il l’enfila : on aurait dit qu’il entrait dans un tonneau par le fond. La cicatrice étincela et disparut. Raisonnable, moi qui, comme Nelligan, « marchait à tâtons dans ma jeunesse noire »? Quand je vis sa tête ahurie émerger de la soutane, j’éclatai d’un rire fou, que tout de suite le père imita. Le geai s’en mêla, et aussi la rivière, qui ricana comme du cristal. »

« Tu sais, tous les humains, les météores, c’est du pareil au même : ils ne sont visibles que lorsqu’ils s’enflamment. Et tes mots laissent échapper des feux follets qui montent jusqu’ici. C’est beau ! »