Post coïtum animal tristum...

Dès le titre, le lecteur, pourvu qu'il ait quelques notions d'américain, est prévenu. « Fuck buddies » peut se traduire par « partenaires à baiser ». C'est déjà nettement plus clair et encore n'a-t-on retenu que la traduction la plus édulcorée de l'expression, décence oblige. Fabien Béhar, dans son désir de tout dire avec honnêteté et franchise, est nettement moins pudique. Avec une certaine complaisance et peut-être un brin de mythomanie, il étale, égrène et accumule les récits de « rencontres» de gens péchés sur des sites internet de rencontre gays, accrochés dans des lieux fréquentés par les homos ou récupérés dans des backrooms, arrière-cours et autres endroits plus ou moins glauques. Il donne l'impression d'être une sorte de « Candide du sexe » toujours à la recherche d'un bon coup, d'une sorte de Don Juan collectionneur qui ne va jamais plus loin que le rapport furtif, expéditif voire même brutal. S'il s'est fait une sorte de spécialité des tordus, bizarroïdes, body-buildés, obèses et autres catcheurs masqués, il s'autorise également quelques étreintes plus ou moins réussies avec des femmes toutes folles de lui mais dont il se débarrasse dès la saillie terminée. Serait-il bi voire hétéro refoulé ? Quelques anecdotes tirées de son enfance ou de sa jeunesse refoulée, la dédicace à sa mère qui fut « sa première femme » pourraient donner bien du travail à un psychothérapeute.
Bien qu'il soit cru et assez brut de décoffrage, ce livre n'est pas véritablement pornographique même si, il n'y a pas si longtemps, il aurait causé bien des ennuis à son auteur. Béhar ne nous cache rien, ni ses déconvenues quand il finit par se choper de vilaines MST, ni son refus de pratiquer la sodomie active ou passive. Sans porter aucun jugement sur une attitude de consommation sexuelle qui finit par sembler dérisoire vu que toutes ces rencontres improbables sont sans lendemain, le lecteur ne pourra que se conforter dans l'idée que des amours sans sentiments ne sont finalement que peu de choses. Une sorte de sale manie pas très éloignée du TOC... Un seul « partenaire » trouve grâce à ses yeux, un Belge auquel il semble plus attaché mais dont il déteste déjà les odeurs, les manies et même la musique. Celui-là aura droit à sa compagnie un peu plus que quelques heures. Quelques jours ou semaines peut-être ?
Ce livre est une sorte de recueil d'anecdotes, de rencontres et d'historiettes croquées sur le vif qui tiennent chacune sur une page environ, présentées en vrac, sans souci de logique ni de chronologie. L'ensemble donne une impression d'écriture faite à la volée, comme ça passe par la tête et s'accorde bien avec cette forme particulière de vagabondage sexuel. On va, on vient, on picore, sans chercher plus loin. On profite de l'instant et on jette le « corps » du délit pour passer à autre chose. Aucune réflexion, aucune recherche, aucune analyse. On surfe sur l'apparence, le masque ridicule du catcheur, l'odeur de sueur et de crasse de celui-ci, les poils drus sur les cuisses de celui-là. Et au bout de la lecture, le dégoût et l'ennui qui nait de tant de monotonie et d'uniformité. Tout est tellement répétitif, ces corps baisés ou caressés sont tellement interchangeables que ça peut lasser très vite. Post coïtum animal tristum...

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  Fuck Buddies et autres corps anonymes

  de Béhar, Fabien
  la Musardine
  ISBN : 9782842715113 ; 16,00 € ; 18/10/2012 ; 192 p. ; Broché

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