L'enfant et les jeux dangereux - Jeux post-traumatiques et pratiques dangereuses
de Hélène Romano

critiqué par Shelton, le 18 octobre 2012
(Chalon-sur-Saône - 67 ans)


La note:  étoiles
Sérieux, grave et à lire !
Qui irait imaginer que je puisse vous inviter à lire un manuel de travail, d’autant plus s’il est destiné à des étudiants en médecine, en psychologie, en éducation spécialisée ? Mais, c’est vrai, aussi, que lire est une bonne façon de s’instruire et s’informer ! Qu'être parents n'implique pas d'être ignare sur les quelques problèmes touchant nos enfants ! On peut avoir peur, et prendre la décision de s'informer pour vaincre nos angoisses... C’est pour cela que je veux aujourd’hui ouvrir le dossier des jeux dangereux, thème qui n’est pas si simple à aborder.

La littérature sur la question est volumineuse et dans cette jungle, parfois technique, souvent larmoyante – mais qui peut en vouloir à une mère d’écrire ainsi quand elle pleure son fils ? – j’ai choisi un ouvrage qui se rapporte plus au manuel professionnel et qui est destiné à l’information des parents et des professionnels qui souvent ne comprennent pas ce qui se joue dans les jeux dangereux et sont perdus dans des angoisses profondes et inhumaines. L’enfant et les jeux dangereux d’Hélène Romano, véritable professionnelle de cette question, a pour objectif de nous donner des informations, des explications, sans nous glacer d’effroi, sans nous faire un catalogue des jeux dangereux avec pour chacun un mode d’emploi. D’ailleurs, ce n’est pas en ayant de peur de tout continuellement que l’on peut aider les enfants à se sentir mieux et à ne pas tomber dans le drame.

En s’appuyant sur une phrase de Winnicott, elle va nous faire entrer dans l’univers du jeu. Ce n’est pas un simple amusement, c’est une véritable partie de nos vies, que l’on soit enfant ou adulte, et c’est ce jeu qui nous permet d’être, d’exister, de grandir, d’apprendre, de créer…

Si on veut comprendre comment le jeu et la prise de risque peuvent se combiner, il faut bien prendre en compte que le jeu a une triple vocation : – espace de pensée et d’apprentissage – lieu d’expression des pulsions et de réalisation des fantasmes – une aire d’expérience et de connaissance du monde des adultes. Il y a bien les trois aspects et donc on comprend assez facilement pourquoi on peut parler d’aspects réels (expression, apprentissages, pensées) et virtuels (fantasmes, pulsions, imaginaire).

De plus cela est une activité aléatoire, c’est à dire que l’issue de la partie n’est pas connue à l’avance et je peux même dire que je m’interdis de tricher si je veux rester dans la notion de jeu. Or, qu’est-ce qu’un risque ? C’est un danger éventuel, plus ou moins prévisible. Jouer, c’est prendre des risques mais il y a beaucoup d’écart avec le fait de prendre des risques dans la vie, hors du jeu. C’est entre ces deux domaines que se situent les jeux dangereux.

En lisant cet ouvrage, on comprend pourquoi la prise de risque est tant valorisée dans un monde où il faut toujours aller plus fort, plus haut, plus loin, plus vite. Pourquoi cette façon de vivre ne toucherait-elle pas les jeunes aussi ? Trader à la bourse ou dévaler une descente neigeuse hors-piste au milieu des rochers, quelle est l’activité la plus risquée ?

Mais si certains comportements sont assez classiques, il en est d’autres plus atypiques avec des très jeunes enfants qui se mettent en danger de façon grave, avec des comportements à risques qui viennent suivre un traumatisme. C’est le cas d’enfants dans des fratries avec un enfant très malade ou gravement handicapé, dans des familles sans repère, avec des violences intra-familiales, avec des ruptures soudaines et très violentes… Certains enfants peuvent mettre leur vie en danger avec des conduites addictives mortifères, des prises de produits toxiques, des pratiques sportives extrêmes, des jeux dangereux comme la tomate, le foulard, le toréro…

Je ne peux pas, dans un espace si restreint, entrer dans tous les détails de la question et de l’ouvrage. Chaque parent ou éducateur trouvera-là un support pour comprendre ces activités, les façons de les voir arriver et se mettre en place, et aussi les outils pour développer des préventions profondes et non superficielles pour aider chaque enfant à prendre sa place dans notre société. Les parents et les éducateurs ne doivent pas se sentir seuls et cet ouvrage permettra de rompre l’isolement par la parole, le contact, les échanges, la compréhension… de mécanismes qui sont complexes mais bien réels…

C’est un excellent livre, assez accessible mais écrit avec délicatesse pour aider les parents dans leur délicat métier de pédagogue au service de leurs enfants !