L'hiver des hommes de Lionel Duroy

L'hiver des hommes de Lionel Duroy

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Yotoga, le 10 septembre 2012 (Inscrite le 14 mai 2012, - ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 083ème position).
Visites : 4 322 

Un roman ou un état des lieux ?

On enquête avec le narrateur dans l'ancien territoire de Yougoslavie.

En premier plan, l'auteur offre une réflexion sur le rapport qu'ont les enfants de criminels de guerre avec les idéologies de leurs parents, basée sur l'énigme de la mort d'Ana Mladic. Il se réfère à des recherches et reportages sur les enfants de nazis, comme Gudrun Himmler ou Norman et Niklas Frank. Chaque information est annotée de la source, et recoupe un reportage que j'ai vu sur Arte récemment. Ce qui m'amène à me demander si ce livre est vraiment un roman, un essai ou un reportage ?

De plus, je dirais que le thème principal du livre sont les dialogues rapportés avec toutes sortes de serbes, de la république de Serbie ainsi que de la République serbe de Bosnie. Il en ressort le fanatisme de certains par rapport aux musulmans de Sarajevo, la corruption que l'entrée dans l'Europe semble accentuer, la tristesse et l'ennui d'une jeunesse sans avenir et les différents clans de serbes ...

Lionel Duroy avait déjà publié "il ne m'est rien arrivé" en 1994 (sous titre : voyage dans les pays en guerre de l’ex-Yougoslavie). Je suis perplexe : ce livre est-il un pendant, un état des lieux 20 ans après ?

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8 étoiles

Critique de Pascale Ew. (, Inscrite le 8 septembre 2006, 56 ans) - 23 février 2013

Ce livre est plutôt un reportage mené en république serbe de Bosnie. L’auteur prend le nom de Marc, écrivain, et il a qualifié son œuvre de roman parce qu’il a imaginé le dialogue entre le général Mladic et sa fille Ana. Cette dernière s’est suicidée, avec l’arme préférée de son père, peu de temps après le massacre de civils musulmans au marché de Sarajevo en 1994. Et l’écrivain tente de reconstituer les circonstances de cette guerre en interrogeant des Serbes. Ceux-ci disent avoir été acculés à la guerre par les autres - tandis que leurs ennemis affirment la même chose - et avoir mené un combat juste, incompris du monde, voire poussé par l’Europe (« Si tu veux acheter la maison dont tu viens d’hériter avec tes frères, dit-il, qu’est-ce que je vais faire ?
(…)Je vais m’arranger pour vous monter les uns contre les autres jusqu’à ce que la haine vous conduise à vous entretuer. Avant la guerre, la Yougoslavie était le plus grand marché de l’Europe, sa seule faiblesse était d’être une copropriété. »).
Malgré tout, ce qui ressort de ces témoignages, c’est la défaite : « Ils ont obtenu les frontières qu’ils souhaitaient des accords de paix, mais ces frontières les condamnent à un isolement qui les précipitent dans le malheur et la dépression. Néanmoins, ils sont condamnés à défendre cet isolement, ces frontières, et même à en vanter les mérites pour ceux qui ont le plus souffert de la haine des autres. »
L’auteur tente de comprendre ce qui pousse des hommes vivant fraternellement à s’entredéchirer et les mécanismes qui font ressortir le mal en nous. Il explique son approche : « Ce que j’aimerais, c’est que les gens ne me voient pas et que, se croyant seuls, ils se mettent à dire tout haut les pensées et les images qui les traversent. Je passerais mes jours à les écouter, et mes nuits à remplir des livres. Je serais le greffier de la vraie vie, celle de nos ténèbres, l’envers du décor que nous nous efforçons d’offrir chaque jour, je donnerais à voir toute la machinerie de nos âmes en plein travail, cherchant une issue à tâtons, se cognant, se blessant, éructant, pleurant silencieusement parfois, mais continuant malgré tout d’espérer atteindre la lumière. »
Dans le même temps, Lionel Duroy relie ces événements tragiques à sa vie personnelle (thème récurrent de ses livres) et à son éloignement de sa femme et de sa famille : « Nous croyons qu’à rompre avec la source du mal nous allons pouvoir inventer notre propre vie et apporter le bonheur à nos enfants, (…) alors que nous sommes faits de ce mal et qu’ainsi il continue de nous habiter et de nous ronger quoi que nous décidions, et quel que soit l’endroit du monde où nous allions nous réfugier. Nous croyons qu’un jour nous aurons le droit à l’oubli, à la paix, à la beauté, c’est ce qui nous pousse à continuer d’avancer, d’aimer, de réfléchir, d’écrire, mais sans doute n’est-ce qu’une illusion. Celui qui est issu de la haine et de la folie (…) semble condamné à ne produire que de la haine et de la folie, et ainsi à détruire les siens à son tour. »
Je trouve cependant cette forme de narration (une collection de conversations et de rencontres) peu attrayante à lire, fastidieuse, bien que très intéressante et je n’ai pas aimé certaines redondances.

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