Les lisières de Olivier Adam

Les lisières de Olivier Adam

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Hexagone, le 29 août 2012 (Inscrit le 22 juillet 2006, 53 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 9 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (15 066ème position).
Visites : 7 255 

A la périphérie des classes.

Paul, est un mâle blanc, pleurnichard et quarantenaire.

Mis à la porte par sa femme Sarah, Paul enrage et se replie sur lui même, il erre entre son appartement et les côtes des finistères, la périphérie de la terre, sa fin qui s'ouvre sur l'Océan.
Maladivement amoureux, perturbé par l'éloignement de ses enfants, Paul ne trouve pas les solutions.
Entre virées en canoé sur l'océan, balades sur les sentiers douaniers entourés de dunes plantées d'oyats, Paul rumine.
C'est dans la ville de son enfance à V. dans l'Essonne qu'il va être appelé, car sa mère va mal.
Les alentours de Draveil sont souvent les lieux de prédilection où se passent les romans de Olivier Adam, il va ici nous dépeindre la banlieue de son enfance, la périphérie urbaine qui constitue la lisière des classes sociales, de ces mondes qui ne se pénètrent jamais.
L'adolescence, les amis, la cité, les parents, la fuite à Paris et l'abandon des amis restés sur place constituent une grosse partie du livre.
Les relations père- fils, les relations mari- femme et père- enfants jalonnent tout le roman, comme un inventaire des années passées.
Les faux-semblants et l’absence de ce frère, ce secret de famille, ce non-dit qui ne demande qu'à éclater, pour libérer les êtres de leurs chaînes, qui sont bien trop lourdes à porter pour Paul.
Adam se situe au centre d'un triangle constitué selon moi de Djian au sommet et de Beigbeder et Houellebecq aux autres points.
Adam écrit bien et c'est un plaisir que d'enchaîner les pages, on est pris dans cette description de la galère des uns, des ennuis des autres et de ces destins que nous connaissons tous.
Adam est inégalable dans sa transcription de la banlieue sud, que j'ai bien connue.
Je dirais qu'il s'agit de zones de non-vie, à l'instar des zones de non-droits des banlieues nord.
Lecteurs mélancoliques, attention, ce livre peut vous faire basculer, pas d'euphorie, vous n'êtes pas en train de lire le scénario du prochain Dany Boon.
C'est glauque, humide et froid, de quoi donner le spleen à toute une bande de larrons en foire.
Le livre pèche sur certains points, notamment la prise de position politique permanente de Paul en faveur d'une gauche de bobos, l'équilibre est rendu par son frère vétérinaire qui incarne l'électeur UMP de base, entendez riche et éloigné des difficultés des vrais gens d'en bas, étage réservé de droit à la gauche, ce qui me semble être une très mauvaise analyse de la situation, passons.
Il y a l'ombre de la Blonde, fille du Borgne qui plane sur le livre, Adam nous propose une société de bisounours, mixophile et mondialiste.
Mis à part ce qui est pour moi une erreur de traiter le problème de la société sous le prisme de la politique politicienne, Adam a écrit un bon livre égal aux précédents, aussi troublant et performant.
Mâtiné de Zola et de Ballard pour les traits de ces hommes esclaves de leur travail avilissant et asservissant évoluant au milieu de ces grands ensembles cernés d'une forêt maléfique qui permet d'évacuer les tensions de la ville broyeuse d'âmes humaines, Les lisières est un bon livre.
Adam a son style bien à lui, il ne dénote pas dans l'ambiance générale de tous ces auteurs à succès, il oscille entre le désabus, le désespoir et l'éventuelle étincelle qui pourrait rallumer le feu sacré de l'homme moderne assoupi entre deux bières et une coupure pub de TF1.

J'ai entendu que Adam était pressenti pour le Goncourt, je trouve cela un peu osé, j'estime qu'il lui faudra plus d'audace, s'éloigner de son centre pour aller écrire aux périphéries de cette littérature un peu convenue, tremper sa plume dans les océans du bord du monde, juste au point d'équilibre avant la chute.

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Tout cela aurait pu être…

6 étoiles

Critique de FranBlan (Montréal, Québec, Inscrite le 28 août 2004, 81 ans) - 17 novembre 2014

Le lien entre réalité et fiction semble bien ténu dans cette œuvre, mais je ne connais pas Olivier Adam personnellement…
J’avais envie de lire cet auteur depuis quelque temps et c’est fait, grâce à la générosité d’une amie qui m’a prêté ce livre.
Roman en forme d’autofiction ou autofiction qui fait semblant d’être un roman?
Ce qui est indéniable est la domination omniprésente du “je” dans cette narration; un “je” inlassablement critique, moralisateur, geignard, égocentrique à la limite de l’intolérable.

À travers ce qui ressemble à une très longue logorrhée littéraire, Olivier Adam parvient à poser des état de faits pertinents et universels: le marasme des banlieues, l’engluement du couple, le désastre du vieillissement de la population.
Trois piliers de ce roman qui nourrissent largement le sentiment de déprime du narrateur… et du lecteur.
Ce n’est pas une raison pour frapper littéralement sur tout ce qui bouge de façon aussi blessante, méprisante, condescendante pour la simple raison que tout ce qui bouge ne parvient pas à réussir le test filtrant de son jugement nombriliste.

J’ai lu ce pavé jusqu’au bout!
Trop souvent de peine et de misère à cause de la lourdeur du propos; à cause aussi de la qualité exceptionnelle de l’écriture, pourtant, Olivier Adam nous donne l’impression de tourner en boucle au cours de ces longues, très longues quatre cent cinquante pages. Toujours les mêmes obsessions, les mêmes images, les mêmes souvenirs, les mêmes propos reviennent. La répétition est porteuse de force d’impact pour autant qu’elle ne vire pas à l’overdose, ce qui est malencontreusement le cas ici.
Tout cela aurait pu être un roman poignant, une oeuvre grandiose j’oserais dire…

Mots et maux de bobo

3 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 65 ans) - 7 mai 2014

"J'avais dans les tiroirs une défense toute prête que je sortais à chaque fois que dans un débat, une librairie, quelqu'un prenait la parole pour s'en prendre à la littérature française soi-disant nombriliste et égocentrique, mais j'ai préféré me taire."
Et bien, ce n'est pas ce roman là qui contredira cette affirmation !
L'auteur, ou plutôt Paul, son héros (ou son pseudo !) raconte ses années d'enfance dans un quartier populaire de la région parisienne, mais surtout son mal-être auprès des membres de sa famille, de la société en général.
Sa compagne vient de reprendre sa liberté et il souffre terriblement de leur absence.
Rien de très original dans cette vie.
Une enfance dans un foyer sans amour dont il apprendra tardivement les raisons, l'adolescence et sa volonté de démarcation, puis son métier d'écrivain, le plaçant à la "lisière" de la vraie vie, lui ôtant toute légitimité de parti pris dans ses opinions, dans ses prises de position politique, dans sa vie sociale, même auprès de ses anciens copains de collège ou de lycée.
"Enfin, je ne sais pas pourquoi je te raconte ma vie comme ça. Surtout que ça va finir dans un de tes livres."

Malgré ce malaise, cette souffrance, on n'arrive pas à "y croire". Cet homme qui vit du métier qu'il aime n'arrive pas à nous faire partager les affres de la création; égratignant au passage ses collègues auteurs de best-sellers comme Levy, Musso, Gavalda, Pancol (cela rime à quoi d'intervertir les noms et les prénoms), évoquant sans les nommer Nothomb et Houellebecq.
Même les descriptions des paysages bretons, souvent très poétiques frôlent parfois la grandiloquence.
Les seules phrases qui m'ont vraiment touchée sont celles concernant son amour et son attachement viscéral à ses enfants.

Mais où s'arrête la réalité, où commence la fiction?

"Mes livres et ceux de mes confrères n'aidaient nullement les gens, au contraire ils enfonçaient les plus fragiles, les plus inaptes, ils les confortaient dans leurs humeurs les plus noires, leur maintenaient la tête sous l'eau, dans l'étang poisseux de la dépression, la vase verdâtre de la mélancolie. Ils glorifiaient la tristesse et les éclopés, la défaite et la désillusion, la fuite et la désertion, comme s'il était plus noble d'être de ce côté-là que de celui de la vie et de la lumière."

Un livre que j'ai trouvé lourd, rempli de poncifs, de répétitions, de longueurs, et surtout "nombriliste et égocentrique" ; très déçue par ce titre, moi qui avais tant aimé les précédents...

Une nature périférique

8 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 19 janvier 2014

Sans aucun doute ce roman ne laissera indifférent aucun lecteur, même celui qui avait auparavant goûté et apprécié le verbe de l’auteur. Olivier Adam donne l’impression, à travers ce roman, de vouloir se justifier dans une sorte de testament littéraire. En effet, personne n’est dupe, le héros a plusieurs points communs avec le romancier. Essentiellement, un être déboussolé, cherchant non pas comme dans certaines histoires une identité nationale ou culturelle, mais ici une sorte d’identité sociale, comme si l’ascenseur social avait déraillé ou provoqué une commotion.
Certes ce roman peut aisément agacer à la fois par ses critiques acerbes de la société républicaine et par ses répétitions ; cela révèle pour moi clairement des obsessions dans le chef de l’écrivain.
On baigne aussi dans un climat de violence morale constante en provenance de la famille, du milieu professionnel et de l’entourage en général. Cette atmosphère pesante et ce pessimisme permanent sont assez typiques de l’auteur, mais ici, ils permettent une identification plus profonde.
Alors dire que je n’ai pas aimé, …. pas du tout, vous m’avez mal compris. Ce qui précède constitue des avertissements à ceux qui n’aiment que des romans optimistes et truffés de mots d’esprit. Il faut donc pour eux s’abstenir de commencer ce livre qui n’est pas fait pour remonter le moral. L’auteur décrit dans un style épuré et juste des formes plausibles de réalités ordinaires, parfois à la limite du sordide, tout en concluant dans les dernières pages par une certaine espérance.
On ne rit pas un seul moment et on a l’impression que le décor est constamment plombé. Il n’empêche que l’auteur a le très grand mérite de pouvoir faire ressentir des émotions qui percolent littéralement dans la peau du lecteur.

La boboattitude

7 étoiles

Critique de Ndeprez (, Inscrit le 22 décembre 2011, 48 ans) - 3 septembre 2013

Qu'il est énervant ce Paul à prendre position sur tout et n'importe quoi , sa femme l'a mis dehors.. .comme on la comprend.
Olivier Adam a crée un personnage que j'ai trouvé franchement antipathique tellement il est égocentrique.
Néanmoins l'histoire se suit sans désintérêt et l'auteur a le bon goût de le rendre humain à mesure de l’état d'avancement du texte.
Beau roman autour des histoires de famille cachées (tiens encore un ...) et des problèmes qui en découlent.

le charme d'adam…

10 étoiles

Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 75 ans) - 3 mars 2013

Un voyage à rebours, vers un passé qu'il aurait voulu oublier. Le narrateur (qui a beaucoup emprunté à l'auteur, ou bien est-ce le contraire?) revient vers cette banlieue francilienne, qu'il a tant détestée et fini par fuir au fil de sa carrière d'écrivain à succès. Sa mère est hospitalisée, elle n'a plus toute sa tête et son père va se résoudre à vendre le pavillon qui a abrité toute leur vie de couple, pour entrer en maison de retraite. Les souvenirs affleurent, il retrouve des amis oubliés, un amour de jeunesse, resté inabouti, qui va refleurir à l'âge de la maturité. Toujours insatisfait, aigri par la vie (qu'il a choisie), il va une fois de plus passer à côté d'un bonheur possible et toujours repoussé. Dans ce récit amer, Olivier Adam se met à nu et va partager avec nous, le temps de la lecture et bien après, ce mal de vivre qui ne le quitte jamais. Une profonde sensibilité aux choses et aux êtres, le charme d'une écriture souple et attentive à décrire avec précision les petites choses de la vie, et beaucoup, beaucoup de vérité...

les lisières

8 étoiles

Critique de Anneke (, Inscrite le 9 décembre 2012, 61 ans) - 9 décembre 2012

c'est le premier livre d’Olivier Adam que je lis - et je vais me lancer à la découverte des autres.
Effectivement les situations décrites sont banales mais j'ai trouvé que les mots étaient justes, et les phrases bien belles souvent.
Je ne me suis pas ennuyée du tout, j'avais envie d'avancer dans ce beau livre que je recommanderais sans hésiter.

Lieux communs sur le divorce et la solitude

4 étoiles

Critique de Elya (Savoie, Inscrite le 22 février 2009, 34 ans) - 18 octobre 2012

Passer de Balzac à Adam ; le choc est rude.
J'ai adoré étant adolescente Poids léger, On ira voir la mer, Je vais bien ne t'en fais pas, Falaises. Je me rappelle avoir pensé que Olivier Adam écrivait bien, de manière poétique. Déjà ses univers étaient semblables à celui des lisières : atmosphère pesante, solitude ressentie à travers des personnages peu originaux, dans lesquels on peut facilement se reconnaître. Le style d'Adam n'a pas changé, mais moi oui. J'ai de plus en plus de mal avec les livres écrit de manière aussi plate et qui reflètent des thématiques habituelles de notre quotidien : famille, divorce, vacances, gardes séparées, regrets, adolescence, secrets, alcoolisme, ennui... Forcément, ça se lit vite et bien, mais qu'est ce que ça nous apporte ? L'histoire que conte ici Olivier Adam est celle vécue par certaines personnes de notre entourage, une grande partie même. S'il l'abordait d'une manière originale ; avec humour, ou en situant ça dans un contexte socio-politique particulier, ou en caricaturant... pourquoi pas. Ici, le caractère soporifique l'emporte.

Les lisières

8 étoiles

Critique de Sarazohra (, Inscrite le 3 mars 2012, 36 ans) - 21 septembre 2012

C'est l'histoire de Paul. Il est séparé de sa femme qu'il aime plus que tout et veut récupérer. Il en parle du début à la fin. Ils ont deux enfants. Il les aiment. Ils ne supportent pas de les voir une semaine sur deux et que le week end.

Paul en plus a des parents qui n'expriment pas leur affection. Ils sont durs avec leur fils qui au final ne se trouve aucun lien avec eux. Il a aussi un frère que tout sépare notamment la politique. Quand lui est de gauche, sa famille est de droite voire même de l'extrême droite.

C'est ça son histoire. Sa vie près de la mer où il déprime, boit, flâne dans les bars et sa vie chez ses parents car sa mère se fait hospitaliser. Il y revoit des anciens amis de lycée dont pour certains il s'en souvient à peine.

On s'attache au personnage... On aimerait que Paul se remette avec sa femme, on aimerait que Paul se réconcilie avec son père que l'on découvre au fil des pages et des descriptions très précises.

Adam Olivier décrit tous les paysages, les visages, les situations de façon tellement précise qu'on s'y croirait.
Un agréable moment où on a l'impression au final de faire partie de cette ville V et de connaitre chacun de ses habitants.

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