Chronique des branches
de Adonis

critiqué par Septularisen, le 19 août 2012
(Luxembourg - 56 ans)


La note:  étoiles
UNE QUÊTE DE L’INSAISISSABLE…
On ne présente plus le libanais ADONIS, de son vrai nom Ali Ahmad sa’îd, animateur de revues, essayiste, enseignant, véritable chantre du «Printemps arabe », et surtout, poète le plus célèbre du moyen Orient, dont le nom revient tous les ans parmi les grands favoris pour le Prix Nobel de Littérature, et avec encore plus d’insistance ces dernières années…

Mais oublions un peu tout cela, et découvrons le poète derrière l’homme…
Disons tout d’abord que si un poète arabe contemporain tente, dans sa poésie, l’osmose entre l’Orient et l’Occident, c’est bien ADONIS ! Sa poésie mêle tradition et modernité créatrice, elle est toute en impressions, toute en figures, gestes, paroles, émotions, méditations, qui se dégagent lors de la lecture …

« Chroniques des branches » n’échappe bien sûr pas à tout cela. C’est un recueil de poèmes cours, concis, tout en dépouillements, toujours servis par la très belle écriture du poète. On y retrouve des thèmes et des personnages déjà présents dans d’autres livres du poète. Citons pêle-mêle : la route, les chemins, l’errance, l’arbre, la pierre, l’herbe, la foudre, l’éclair, le déluge, le feu, le vent, la poussière… et aussi les personnages d’Orphée et de Mihyar le Damascène, véritable double littéraire du poète…

La poésie d’ADONIS, dont il a été dit, par des lecteurs arabes, qu’elle est obscure, se lit de façon bien plus limpide en Français. Mais qu’on ne s’y trompe pas, l’apparente simplicité de ces poèmes, leur dépouillement extrême, recouvre un monde plus « fermé », plus «obscur», beaucoup plus « hermétique » que ce que l’on pourrait imaginer… Un monde où quand l’auteur parle d’un arbre, ou d’herbe, il n’est pas question… d’arbre ou d’herbe en tant que tels, mais de leur représentation, de ce « qu’ils disent » au lecteur, et surtout du « message » poétique qu’ils arrivent à faire passer chez le lecteur, par leur beauté, leur existence, leur essence même…

Mais assez de théories, qui de toute façon ne pourront jamais assez bien expliquer la poésie d’ADONIS…
Alors, laissons juste la parole au poète et à sa poésie…

MIROIR DU TÉMOIN

Lorsque les lances se sont plantées
Dans les entrailles de Husseyn*
Et qu’elles se sont parées
Du corps de Husseyn
Lorsque les chevaux on piétiné chaque parcelle
Du corps de Husseyn
Et qu’ont été volés et partagés
Les vêtements de Husseyn.

J’ai vu les pierres s’attendrir sur Husseyn,
J’ai vu les fleurs s’endormir sur l’épaule de Husseyn,
J’ai vu les rivières avancer
Dans le cortège funéraire de Husseyn.

*Husseyn : Petit-fils du Prophète, fils de ‘Ali, il mourut assassiné.
Vénéré comme martyr par une grande partie des musulmans.