Légendes de la mythologie nordique
de Jean Mabire

critiqué par Nance, le 18 août 2012
( - - ans)


La note:  étoiles
Du beau travail, clair et instructif
« Les dieux du Nord connaissaient le temps. Ils étaient soumis à l’enchaînement du passé et de l’avenir. Aussi leur aventure connaît-elle un crépuscule - que suivra inévitablement une aurore. »

L’amour, l’aventure épique et le fantastique sont au rendez-vous ! Ce livre est un essai relativement court, mais retrace les grands événements des dieux maudits d’Asgard. D’une mythologie nordique chaotique et contradictoire, l’auteur a voulu lui donner un peu d’ordre et en faire un petit récit vulgarisé.

« Ce qui m’importe, avant tout, ce sont des personnages, un climat, des paysages. Ce que j’ai voulu, c’est rendre intelligible et même logique un ensemble d’une immense confusion. »

L’écriture est du genre prose roman, facilite la lecture, la rend plus intéressante. L’essai comporte trois parties (la naissance, les aventures et le crépuscule des dieux) composées de courts épisodes. Notable absence : l’auteur a écarté la légende de Sigurd / Siegfried pour limiter le nombre de pages et parce qu’elle est assez connue, il aurait préféré consacrer un livre entier à ce sujet.

J’avais peur que le livre soit difficile d’accès, mais ça n’a pas été le cas. C’est facile quand on sait quel personnage est qui et l’auteur rend la tâche très facile. L’auteur à simplifier l’orthographe des noms (éviter les noms alternatifs des personnages en utilisant le même partout). Il y a aussi à la fin de l’ouvrage un lexique complet et pratique, où l’on peut se référer. Bien que peu essentiel (mais apprécié), mon édition (L’Ancre de Marine) avait aussi à son centre des photographies de toiles, sculptures et gravures, qui rajoutent un petit cachet à l’ensemble et m’a fait découvrir des oeuvres que j’ignorais.

On m’a fait remarqué la réputation de l’auteur (ses affinités avec l’extrême droite ?), mais à la lecture du livre, je ne crois pas que ça transparaît et que ça soit un problème. On sait que cette mythologie peut attirer ce genre de personnes (qui y voient la suprématie de la race blanche ?), mais je ne crois pas qu’il faut pour autant se retenir de lire sur le sujet, tellement que c’est bon, épique et tragique. Je crois qu’on peut lire ce livre sans se dire que c’est de la propagande.

Je recommande cet essai à tous ceux qui veulent en connaître plus sur la mythologie nordique et lire du plus accessible que les épopées poétiques comme les Eddas et les Sagas. Ce livre est très facile, clair, instructifs, avec l’essentiel de la mythologie (minus Sigurd / Siegfried) et un auteur avec un bon talent de conteur.

« Et puis, soudain, une impression s’affirme. Le chaud et le froid. Ce sera le début de tout. La vie, désormais, va se trouver partagée entre ces deux forces que sépare Ginungagap : la glace et le feu. »

« Ainsi s’opposent la force et la ruse, en une lutte éternelle, qui ne connaîtra ni vainqueur ni vaincu car le triomphe et la défaite sont également mensongers et seul compte le combat, indissoluble enlacement de la mort et de la vie, du bien et du mal, de la joie et de la peine. »

Pour ceux qui veulent lire plus sur Sigurd / Siegfried, ce qui manque à ce livre, je peux recommander les deux lais de La légende de Sigurd et Gudrún de John Ronald Reuel Tolkien (sur Sigurd évidemment, de la légende norroise) et l’album Le trésor des Nibelungen de Maria Luisa Gefaell de Vivanco (sur Siegfried, la variante allemande). C’est ceux que j’ai lu, mais je ne doute pas qu’il y ait une quantité industriel de livres à ce sujet, c’est la raison pour laquelle je n’en ai pas fait un drame avec cet essai. Personnellement, je préfère la version allemande du mythe (pour l’anneau maudit, Siegfried qui se baigne dans le sang du dragon Fafnir pour se rendre immortel, les défis de Brunhilde à Gunther, le fourbe Hagen de Troneg, etc.), mais les deux sont riches à leur façon. Je crois que les gens devraient lire davantage sur la mythologie nordique, c’est du tout bon.
Les dieux de l'Asgard 8 étoiles

Beaucoup moins connue que les mythologies grecques et latines, leurs homologues nordiques sont assez différentes, tout en ayant néanmoins bien des points communs. (La création du monde, les personnalités des dieux, les incarnations du Mal (Loki) et du Bien (Balder), la fin du monde, le Ragnarok, cette terrible Apocalypse du Septentrion, etc.) Toutes ces légendes commencent par un meurtre. Aidé de ses deux frères Vili et Vé, Odin tue le géant Ymir. Son petit-fils Bergelmir réussit à s’enfuir avec toute sa famille sur un navire voguant sur des eaux écarlates. Il donnera naissance à de nouveaux géants élevés dans la haine et l’esprit de vengeance. Du corps du géant Ymir va naître la terre. Le sol est formé de sa chair, l’océan de son sang, les montagnes de ses os, les forêts de ses cheveux et les cailloux de ses dents. Son crâne donnera le ciel et son cerveau les nuages. Et les dieux fabriqueront à partir de deux arbres, le premier homme Ask (le frêne) et la première femme Embla (l'orme). Ils sont dotés d’un beau teint clair et de cheveux blonds qui les distinguent de la race si sombre des géants. Et pour ne rien gâter, tous deux sont beaux, bons et sages…
« Légendes de la mythologie nordique » est un essai de vulgarisation sur un sujet rarement abordé. Les dieux de l'Asgard ayant été à la fois méprisés et ignorés dès l'arrivée du christianisme, l’auteur est retourné aux sources, les « Eddas » islandaises et les sagas danoises et norvégiennes pour nous présenter une mythologie tourmentée, bien à l’image des peuples et des climats qui en furent la matrice. Le lecteur aura sans doute un peu de peine à s’y retrouver dans la multitude de dieux, de géants (leurs perpétuels ennemis), mais aussi d’elfes, de nains et de monstres en tous genres. Ces histoires pleines de bruit et de fureur n’en demeurent pas moins relativement poétiques, et surtout terriblement symbolique, même si la lutte, le combat, la violence, en marquent quasiment tous les épisodes. Il est aussi noble pour les dieux de brandir une épée que de vider une corne à boire. Ce qui est ignoble, c’est la lâcheté, le mensonge et le parjure. Cet ouvrage agréable à lire pourra servir de référence pour qui veut s’initier aux anciens mystères du Nord. On y trouve d’ailleurs en fin de volume un important index regroupant une courte présentation de tous les intervenants qui sera très utile pour s’y retrouver dans ce foisonnement.

CC.RIDER - - 66 ans - 16 octobre 2023