Antonin Dvorak
de Guy Erismann

critiqué par Saule, le 23 mai 2012
(Bruxelles - 58 ans)


La note:  étoiles
Un compositeur fascinant
Dvorak est pour moi lié à une époque (en 2003, quand je l'ai découvert), un endroit (Prague) et une personne (celle qui m'a fait découvrir ce grand compositeur). J'avais eu un coup de coeur pour sa messe en Ré majeur à l'époque, et ensuite sa très célèbre symphonie du nouveau monde. Ce livre de Erisman célébrait le centenaire de la mort de Dvorak (il est mort en 1904, le livre a été publié en 2004), il trainait depuis dans ma bibliothèque, mais n'étant pas un spécialiste de musique classique il m'intimidait un peu. Et bien, c'était une erreur : même si cet ouvrage est assez érudit et pointu musicalement, il est loin d'être réservé à des spécialistes de la musique classique.

Mais ne pouvant juger de la pertinence des nombreuses appréciations enthousiastes et très plaisantes à lire de Erismann sur les innombrables oeuvres de Dvorak, je me contenterai de partager ici le grand plaisir que j'ai eu en lisant le livre. D'abords parce que j'ai découvert et re-découvert quantité d'oeuvres de Dvorak (qui a été un compositeur incroyablement prolifique), que j'ai rencontré un homme et une période fascinants. Un seul risque à assumer : l'auteur partage tellement bien son enthousiasme que ça donne envie de tout découvrir (il a des très belles pages sur l'opéra Russalka par exemple).

L'auteur raconte la vie de Dvorak (et ses oeuvres) dans l'ordre chronologique. Toute sa carrière est imprégnée par le problème du nationalisme tchèque, car sous la domination autrichienne des Habsbourg, les slaves étaient déconsidérés et se battaient pour leur culture. A l'instar de son ainé Smetana, Dvorak sera un chantre de l'émancipation de la langue tchèque dans l'empire. Dvorak était aussi un homme profondément chrétien (son Stabat Matter, une oeuvre chorale, est incroyablement beau), mais aussi un amoureux de la nature un peu panthéiste. On a l'impression que la musique est l'expression de sa vie intérieure. Dvorak était proche de Brahms (qui l'a beaucoup aidé au début), de Tchaïkovski, de Richter et il a fréquenté beaucoup de grands musiciens qu'on croise avec plaisir dans ce livre. L'auteur parle de la musique un peu comme les spécialistes parlent de vin, il y a des couleurs, des sonorités, du bois, enfin tous les sens font partie de la musique. C'est très amusant.

En bonus, il y a un petit texte écrit par Dvorak sur Schubert à qui il rend un très bel hommage (Shubert n'était pas reconnu de son vivant).

Lire un livre comme ça nous réconcilie avec le monde brutal et borné qui est notre quotidien. Ca réchauffe le coeur de voir que des gens comme ce Erismann consacrent leur vie à étudier, répertorier, cataloguer l'oeuvre de grands compositeurs slaves et ainsi transmette leur amour à des amateurs qui vont tomber à leur tour amoureux d'oeuvres dont on ne se lasse pas et qu'on peut apprendre à découvrir chaque jour un peu mieux. Un grand merci à Dvorak, à Erisman, à la personne qui m'avait fait découvrir ce grand musicien (à travers la messe en ré majeur). Et maintenant, je retourne écouter le Stabat Matter, ou alors son Requiem, ou sa messe en ré,..?