La naissance de la kinésithérapie
de Jacques Monet

critiqué par Elya, le 23 avril 2012
(Savoie - 34 ans)


La note:  étoiles
Histoire du métier et des pratiques du kinésithérapeute
L’auteur cite dès les premières pages M Bloch qui nous dit que « L’incompréhension du présent nait fatalement de l’ignorance du passé ». Les motivations de ce livre et de la thèse pour un doctorat en sociologie dont il est issu sont donc à la fois de dresser pour la première fois l’histoire de la profession de kinésithérapeute mais aussi d’expliquer la cause de l’aigreur que peut ressentir la profession vis-à-vis de la médecine, étant sous sa tutelle. Nous aimerions déjà savoir comment l’auteur peut affirmer que la profession ressent une aigreur vis-à-vis du corps médical. Est-ce un avis subjectif ou est-il le résultat d’enquêtes ?

Le livre cible évidemment un public très restreint : des kinésithérapeutes, ou éventuellement des personnes intéressées par cette profession. Le sujet du livre est passionnant et essentiel, malheureusement cet ouvrage est assez indigeste à lire ; trop de noms de médecins et autres professionnels ainsi que de structures cités, trop de dates… Le plan suivi, non chronologique, est audacieux, mais provoque des redites incessantes.
Cependant, on sort tout de même satisfait de ces 400 pages puisque c’est un des rares livres (le seul ?) consacré à ce sujet.

L’auteur s’attarde particulièrement sur le développement du massage, de la gymnastique et de la physiothérapie au 19ème siècle, et au début du 20ème siècle. Une époque de révolution conceptuelle, politique et institutionnelle de l’art de guérir. -- Il se pose une question judicieuse : comment des pratiques d’inspiration populaire peuvent elles pénétrer en quelques décennies le monde médical et universitaire alors qu’elles ont été méprisées pendant des siècles par ceux qui veulent en faire leur nouveau champ d’activité ?
Le développement de la médecine et de la chirurgie à cette époque ont nécessité la présence d’aides pour des pratiques demandant du temps, des efforts, et peu de connaissances médicales. Le terme de kinésithérapie a été contesté depuis sa apparition fin 19ème à cause de son suffixe renvoyant à l’art de guérir, exclusivité médicale, d’où la difficulté de pénétration de cette discipline dans le milieu médical. Finalement, cette activité cherchera plutôt à proposer au soignant des suppléances et à contrôler l’évolution de sa maladie plutôt qu’à le guérir. La pharmacopée de l’époque étant insuffisamment fiable et validée, cela a justifié le maintien de pratiques profanes. Mais c’est surtout les blessés de la première guerre mondiale qui ont permis à la profession de vraiment se développer ; chapitre de l’histoire peu abordé ici.


Dommage donc que ce sujet soit traité d’une façon aussi rébarbative. Est-ce dû à la difficulté de faire d’une thèse un ouvrage grand public ?