Sur fond de mondialisation outrancière, dans les méandres d'une Europe férocement technocrate, nous suivons d'un côté Mustapha, infirmier hospitalier, témoin enthousiaste du retour mystérieux du Général de Gaulle dans les premières années du XXIe siècle, et et de l'autre l'auteur, ou son double de papier quelque peu dilettante, chantre de la préservation de la recette des oeufs mayonnaise "maison" et sujet au lumbago... Comment arriver à concilier tout ce bric-à-brac dans un ensemble romanesque homogène ? Voila qui résume assez bien le côté bancal du livre.

On tourne toutefois assez vite les pages qui se lisent facilement et plaisamment, ne serait-ce que pour essayer de savoir où Benoît Duteurtre veut nous emmener... si tant est qu'il le sache vraiment lui même. C'est parfois un peu redondant et j'avoue avoir parcouru les différentes interventions télévisées du Général avec une certaine distraction.

Les passages critiquant la mondialisation, la prédominance des marchés et la recherche de la croissance à tout prix m'ont par contre paru joliment troussés, acerbes et désabusés à souhait (aparté, pour montrer que je suis tout de même attentif : la description des quatre priorités du projet de rond-point du Flamant Rose est jubilatoire, à ceci près que l'auteur n'en présente que trois)

Alors, j'ai bien évidemment été déçu par la fin, me disant, dès la lecture de la quatrième de couv' "j'espère qu'il (l'auteur) ne s'autorisera pas cette facilité"... et bien si, il l'a fait !

Allez un bon moment de lecture tout de même, à la réflexion, je rajoute une demi-étoile

Byobinou - Rumilly (74) - 54 ans - 23 août 2018

Forcément loufoque (le Général de Gaulle, 120 ans et son épouse, 110) sont de retour, mais bien écrit, drôle et percutant.
Percutant car il pose la question : "qu'avons-nous fait de la France qu'on nous avait laissé à la fin des années 1960 ?". La libéralisation continue de l'économie, la privatisation du service public, l'abandon des destinées du pays à une Europe confisquée par la technocratie et quasi a-démocratique...
Bref sous les aspects de la comédie, de vraies questions de fond sont posées.
Quant à la forme, le récit est fluide et bien écrit, et les mots prêtés au Général, notamment lors d'allocutions télévisées, correspondent bien au style du grand Charles, mariant mise en scène dramatique, "petites phrases" bien senties, clins d'oeil aux rieurs.
Et puis il y a cette délicieuse rencontre avec Jacques Chirac : "Et bien je ne vous félicite pas. L'élargissement de l'Europe, le retour dans l'Alliance atlantique, la privatisation de tout et n'importe quoi... Bref le pouvoir pour le pouvoir et des idées aussi fixes que celles d'une girouette: ce n'est pas brillant pour un soi-disant gaulliste..."

Fabrice - - 38 ans - 19 août 2012