Sous béton de Karoline Georges

Sous béton de Karoline Georges

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Libris québécis, le 11 avril 2012 (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans)
La note : 8 étoiles
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Du Teilhard de Chardin en roman

Sur son site, l'auteure se présente comme une « écrivaine et artiste interdisciplinaire, [qui] explore les concepts et les processus de transformation et de sublimation. Elle s'intéresse aux manifestations virtuelles, aux devenirs possibles, au déploiement de la conscience à travers le dédale technologique et à l'accumulation des savoirs ».
(http://www.karolinegeorges.com/kg#!__kg)

Le rôle qu'elle s'attribue résume aussi son roman. Il s’agit d’une dystopie (fiction inquiétante) qui explore les possibles de l’évolution à l’instar de Teilhard de Chardin. Elle a écrit à sa manière une messe profane pour une humanité confrontée aux continuelles transformations, qui l’obligent à s’adapter constamment. Comme cadre romanesque, l’auteure a choisi une tour tout en hauteur afin que ses protagonistes, qui habitent au 804 du 5969e étage, se protègent des humeurs évolutives. Tous sont soumis aux mêmes contraintes afin d’échapper à la mort comme celle des dinosaures emportés par un univers en mutation. La survie de l’espèce est à ce prix. Un emmurement de béton, qui l’assure contre les vicissitudes de la nature. Le seul enjeu envisageable pour les personnages, c’est la compréhension des causes de ce huis clos obligatoire, comparable à celui des astronautes voyageant à bord d’une navette spatiale. L’Édifice, comme l’auteure surnomme sa tour, est soumis aux mêmes codes, qui régissent l’existence dans un milieu fermé.

La porte de sortie n’est pas très utile en plein vol, pas plus que ne l’est celle de la tour de Karoline Georges. Ceux qui en sont expulsés pour avoir dérogé aux règlements meurent à l’ombre des murs. Tout de même, une fillette du 5969e étage voudrait bien quitter son monastère infernal. Qu’en est-il de l’individualité et de la liberté ? Une plante tropicale croît librement dans un milieu chaud, mais elle n’a pas la liberté de croître en Sibérie. Les humains ont l’insigne privilège de s’adapter. N’est-ce pas là ce qui distingue les êtres pensants des autres espèces ?

L'oeuvre laisse place à de nombreuses interprétations. Et même la facture est protéiforme. Ce n’est pas un roman d’anticipation comme 1984 de George Orwell. Il ne s’agit pas de l’emprise d’un Big Brother. L’auteure décrit plutôt une association apparentée à une communauté monastique, qui articulerait le devenir de l’humanité autour d'un « nous » porteur d'une existence significative.

En somme, c'est un conte philosophique, écrit sous le signe d'une apparente neutralité, qui déplaira à ceux qui aiment s’identifier à un personnage. Son contenu philosophique et aseptisé est véhiculé par une poésie dénudée de sentimentalisme. Une poésie efficace pour stigmatiser l’expérience humaine. Bref, un chef-d’œuvre difficile à apprécier tellement l’auteure s’est maintenue, plus qu’il ne le fallait, au-dessus de la mêlée.

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