Cantate de cristal
de Gilles Laporte

critiqué par Deashelle, le 9 avril 2012
(Tervuren - 15 ans)


La note:  étoiles
Buisson ardent
CANTATE DE CRISTAL
Gilles LAPORTE

Janvier 2012
20 € - 411 p.
CANTATE DE CRISTAL : livre de feu qui dévore. De 1843 à 1881, dans les Vosges, Florent, enfant unique ardemment désiré, voué à devenir verrier comme son père, se découvre un don rare pour le chant.
Florent est l'objet de toutes les attentes et ambitions des siens. Son père, ouvrier verrier, veut que, dans le respect de la tradition, il prenne sa relève au four de la Compagnie des Verreries et Cristalleries de Baccarat. Un jour, à l'église, l'épouse du sous-directeur de la fabrique, Regina Galtier, découvre, bouleversée, la voix du jeune garçon, une voix divine et cristalline. Malgré leurs dix ans de différence, porté notamment par l'amour de la musique, un lien puissant se développe. Commence alors pour Florent le plus cruel des dilemmes : se réaliser dans sa passion du chant ou par amour filial... devenir verrier? (présentation de l'éditeur)

GILLES LAPORTE : voici un créateur d’humanité. Des lignes de ce livre incandescent, ressort une chaleur de fournaise prête à insuffler un cristal le plus pur et le plus musical : celui de l’amour. Avec en toile de fond l’âge d’or des cristalleries de Baccarat, on est invité à une promenade chantante dans l’absolu, l’amour du beau, la passion d’être. C’est une ode vivante à l’humanité de l’homme, du plus petit artisan au plus grand artiste. « Celui qui se perd dans sa passion perd moins que celui qui perd sa passion » Saint-Augustin. Cette lecture caresse, revigore, nourrit, ravit. A chacun d’exploiter le don exceptionnel qu’il reçoit à la naissance. C’est aussi une œuvre de mémoire car l’histoire en marche y est bien présente. Elle retrace la condition humaine d’octobre 1843 au 25 décembre 1881 et ses grands changements industriels. Une histoire de verriers de Lorraine qui longuement tinte aux oreilles avec comme diapason la dignité humaine, et la dimension du féminin dans tout ce qu’elle a de créateur d’espoir. Une histoire qui souligne aussi combien la différence est fertile. C’est cette longue réflexion qui nous accompagne bien après avoir refermé le livre qu’il est difficile de quitter. L’art et l’amour se rejoignent dans un creuset de terre d’air et de feu. Fusion de la voix et du verre. Manque le quatrième élément ? Vous aurez presque à chaque page des larmes d’extase ou de dénuement qui vous brisent le cœur. Le style, la musicalité de la langue et ses archaïsmes de terroir développent le message avec la puissance de grandes forges. Cette cantate de cristal porte bien son nom, touche au plus profond de notre être, chante une œuvre de générosité et de cœur tissée en contrepoint de notes divines de Jean-Sébastien Bach. Les grandes orgues.

http://www.gilleslaporte.blogspot.com/
http://fr.wikipedia.org/wiki/Gilles_Laporte
Chanter, c'est prier deux fois 9 étoiles

Elle n’est pas facile la vie des ouvriers des cristalleries en cette Lorraine du XIXème siècle, mais ils sont si fiers de leurs créations et de leur savoir-faire. Florent est encore tout jeune lorsque son père meurt en lui faisant promettre qu’il suivra ses traces en étant verrier. Pourtant, son rêve était de chanter. Il a en effet hérité d’une voix « cristalline », don attribué à Marie alors que Jeanne, la mère de Florent, la priait désespérée de ne pas avoir d’enfant.
Toutes les relations évoquées dans ce roman sont empreintes de silences et de non-dits que seule la musique vient parfois troubler, mais si peu. Même elle reste la plupart du temps dans la gorge de Florent qui se réprime de chanter. Ca, j’ai vraiment du mal à le comprendre ! Passe encore qu’il ne veuille pas déranger ses parents, mais en dehors, rien ne l’empêcherait de chanter. Or, il n’en fait rien, jusqu’à ce que sa voix soit cassée par les rudes conditions de son métier. D’autre part, le silence se remplit de rancoeurs, de jalousie surtout entre la mère et le fils et détériore leur relation. Mais cette histoire est racontée avec une grande douceur. Et le style est remarquable : très original, dense, fouillé. L’auteur nous raconte son histoire par touches successives ; il dépeint des tableaux sans toujours aborder les événements les plus importants directement, mais en les laissant deviner.

Pascale Ew. - - 56 ans - 2 octobre 2012