Un ouvrier c'est là pour fermer sa gueule !
de Philippe Poutou

critiqué par Blue Boy, le 7 avril 2012
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
(Petit) coup de gueule d’un « invisible »
« Je suis l’inconnu de la prochaine élection présidentielle, le candidat invisible. Je m’appelle Philippe Poutou. Je suis ouvrier mécanicien dans une usine automobile. Je suis différent de tous ces politiciens professionnels tellement éloignés de notre vie… Pourquoi ceux d’en bas n’auraient-ils pas aussi le droit de prendre la parole ? »

Ainsi se présente l’un des candidats les plus discrets de cette campagne 2012. Je n’ai pas vraiment compris à quoi pouvait servir ce petit livre de 40 pages qui n’est pas un programme mais ressemble plus à une présentation du candidat s’estimant boycotté et méprisé par les médias et son gratin… Les arguments développés sont certes justes et légitimes, le récit du combat du candidat NPA et ses camarades pour empêcher la fermeture de leur usine peut inspirer d’autres salariés menacés, mais on ne trouve rien dans cet opuscule qui puisse réellement nous apprendre ce qu’on ne sait déjà, à savoir que le monde est soumis aux diktats des marchés financiers. Difficile de toute façon de développer davantage en moins de 50 pages.

Malgré toute l’estime que j’ai pour Philippe Poutou et la sympathie qu’il m’inspire, il me semble qu’il était loin d’être le mieux placé pour représenter les salariés et les « invisibles » à une élection de ce niveau. On ne doute pas qu’il soit très bon quand il s’agit de défendre les droits de ses collègues dans son entreprise, mais il faut se rendre à l’évidence. Le système médiatique, si cruel soit-il, ne doit pas servir d’excuse au peu d’audience engrangé par le NPA cette année. D’ailleurs lors des deux précédentes présidentielles, le facteur Besancenot avait bien réussi à se faire entendre ET respecter. Et rien ne le distingue fondamentalement de Poutou, si ce n’est une gouaille indéniable et quelques paroles bien senties avec lesquelles il sait frapper les esprits. La loi médiatique est ainsi faite, il faut faire avec et s’en servir, et cette année, Mélenchon l’a compris mieux que quiconque. Et lui, il a « cogné » !

Il faut dire que Poutou est un candidat par défaut, suite au désistement tardif du facteur et alors que personne n’était volontaire. Certains de ses collègues parlent en plaisantant de cadeau empoisonné (Le Canard Enchaîné du 4 avril). On voit bien que lui-même n’y croit pas beaucoup, d’ailleurs il se marre quand un journaliste lui parle du maigre taux d’intention de vote NPA.

Ce mini-livre ne saurait donc servir de justification à cette mauvaise campagne, ce mauvais choix de candidat, et si Philippe Poutou n’est pas Olivier Besancenot, il est encore moins Stéphane Hessel… D’ailleurs, je trouve étonnant le choix du titre qui se veut rageur mais a en fait une connotation négative (mettons-nous deux secondes à la place du big boss qui va lire ce titre, il ne pourra que sourire !). Tout comme le nom « Nouveau Parti Anti-capitaliste », encore une fois, on est plus dans la critique que dans la proposition. Personnellement, je trouve que « Front de gauche », ça claque beaucoup mieux ! A croire que d’année en année, l’ex-LCR ne cesse de scier la branche sur laquelle elle est assise.