Pays d'aucun mal
de Acherchour El-Madhi

critiqué par Eric Eliès, le 28 mars 2012
( - 49 ans)


La note:  étoiles
Un récit embrouillé et une écriture maladroite
Ce livre, que je me suis astreint à achever (car il est court), a été pour moi une énorme déception. Le 4ème de couverture, extrêmement bien rédigé, semblait promettre une vraie expérience d’écriture par un poète algérien apte à saisir les nuances et les non-dits d'un retour au village natal (Tasta-Guilef), après des années d'errance.
Or le récit tourne à vide. Certaines choses sont confusément et maladroitement évoquées : un village divisé entre deux familles hostiles (les Amnar et les Larabi), une femme qui passe d'un clan à l'autre, des départs et des retours, un puits bouché par de la terre mêlée de sang, un grand-père sauvage et rude qui règne sur le clan des Amnar, une pierre qui semble un signe d'Allah, etc. Mais l'auteur ne fait aucun effort pour immerger le lecteur dans son univers romanesque et, surtout, ne crée aucune tension dans son récit. Tout est plus ou moins le récit embrouillé d'un récit confus... Autant le charme opère dans les "Mille et une nuits" ou dans "Le Manuscrit trouvé à Saragosse", autant c'est ici fumeux (bien plus que mystérieux).
En outre, le livre est mal écrit, malgré quelques belles phrases aux échos mystérieux qui sont comme des fulgurances dans le récit. Je ne parviens pas à me faire une idée pour savoir si les tics d'écriture (abondance des formules telles que "vous savez quoi, vous savez qui" pour interrompre la narration ; emploi surabondant et souvent intempestif des phrases ou des propositions commençant par "non pas que...", répétitions de mots) et les erreurs grammaticales (notamment dans la concordance des temps entre le verbe de la principale et le verbe de la subordonnée) sont des effets (ratés) d'écriture ou sont simplement des fautes.
Pour vous donner une idée du style (dans ses bons et ses mauvais aspects), je vous en recopie un passage caractéristique (nota : les "vous savez qui" et les "vous savez quoi", très abondants, ne sont jamais explicités) :
" Non pas que je soupirais, non pas que je dormais, je pensais à la mort comme tous les enfants de mon âge, rapidement, bêtement. Je pensais assis entre les deux vieux qui étaient là non pas morts, non pas terrifiés par le visage de l'inconnu au visage terrifiant ; ils pensaient dans le silence, psalmodiant maintenant avec tous les hommes de Tasta-Guilef, Amnar et Larabi mêlés, des choses moins funèbres que les divinations silencieuses de vous savez qui".