Mémoires d'Horace
de Alexandre Dumas

critiqué par Killeur.extreme, le 25 juin 2014
(Genève - 42 ans)


La note:  étoiles
Alexandre Dumas dans la peau d'Horace
Quatrième de couverture: " Quand je suis bien las, bien fatigué, bien abruti, je trouve un prétexte pour aller à Rome, et j'y vais. Je vais aller voir la via Appia ; je vais regarder couler le Tibre ; je vais m'asseoir sous une arcade du Colisée, et je me dis à part moi : " Il faut pourtant que je fasse une histoire de Rome ". " Ce désir profond, illustré de-ci de-là, surtout au théâtre, mais jamais complètement mené à bien, Dumas va profiter de la tumultueuse année 1860 pour lui donner chair à travers les Mémoires d'Horace. Pour la plus grande joie des lecteurs du Siècle où le roman paraît en feuilleton du 16 février au 19 juillet.
Ces Mémoires du poète latin sont surtout prétexte à peindre - au couteau - un tableau rouge et noir de ces années de deuil et de feu qui virent la République s'abîmer dans l'Empire. Que de figures inoubliables, à chaque coin de page ! César, Cicéron, Pompée : les Pères, implacables et sublimes ; Antoine, Octave, Brutus : les Fils, féroces et pathétiques. Sans oublier Catilina, conspirateur déclassé, Clodius, débauché populiste, Caton, au cœur sec mais à l'âme noble, Mécène, jouisseur nonchalant, Virgile, chéri des Muses. Et tant d'autres encore. La Rome empoussiérée et amidonnée des manuels scolaires, sous la plume de Dumas, a repris les couleurs de la vie. Les Mémoires d'Horace n'avaient Jamais, jusqu'à aujourd'hui, paru en volume. Cet oubli scandaleux est ici enfin réparé.

Avis: Dès le début du récit, Alexandre Dumas fait croire au lecteur qu'il est en train de lire les "véritables" Mémoires du poète Horace et qu'après les avoir trouvés dans la bibliothèque du Vatican il s'est seulement contenté de les traduire et de les publier, certains chapitres numérotés bizarrement (on saute du chapitre 7 au chapitre 9) laissent à penser que des chapitres se sont perdus et la fin qui annonce une suite qui ne viendra pas, plusieurs hypothèses peuvent expliquer cette fin : Dumas n'a pas pu achever son roman ayant d'autres projets, Horace n'a pas pu donner suite à ses mémoires ou la deuxième partie s'est perdue et seule la première partie a pu être retrouvée.

Alexandre Dumas utilise cette (pseudo)autobiographie pour décrire l'évolution de Rome qui d'une république deviendra un empire et c'est cette histoire que Dumas mettra en scène reléguant Horace plus dans un rôle de témoin que d'acteur bon une fois adulte en tant que soldat il sera plus présent mais toujours dans un rôle de témoin voulant raconter cette période historique aux générations futures.

Alors est-ce que ce roman (les Mémoires d'Horace sont aussi hypothétiques que celles du comte de la Fère -Athos - qui auraient servi de base aux "Trois mousquetaires" et à ses suites, Athos bien qu'inspiré par un personnage réel est une création romanesque et ses mémoires aussi) est digne des chefs d'oeuvres dumasiens? Pour moi c'est plus compliqué, on est plus proches de ses chroniques historiques que de ses romans car comme je l'ai dit plus haut Dumas raconte l'histoire de Rome, il y a les luttes de pouvoirs entres les grands personnages de l'époque César, Pompée, Cléopâtre et le récit s'embrouille quand un des noms désigne un autre personnage. Quand Dumas écrit un roman, il s'attarde sur ses personnages principaux qu'ils soient fictifs ou historiques et il mélange actions, humour, Histoire avec des dialogues percutants, ici c'est un peu comme pour les "Borgia" que j'ai critiqué, on assiste plus à une succession de batailles, des dirigeants romains qui s'élèvent vers les hautes marches du pouvoir et quelque pages plus tard se font destituer ou assassiner et il y a toujours le même schéma 2 ou trois hommes se partagent le pouvoir jusqu'à ce que l'un d'eux l'obtienne seul car le deuxième a perdu l'affrontement soit parce que les oracles ont prédit la chute ou l'ascension de tel personnage et le roman comporte peu de dialogues et l'humour est quasiment absent. Cependant ça reste du Dumas et quand il raconte les souvenirs d'enfance d'Horace et son rapport à l'écriture, il s'inspire de ses propres souvenirs et certaines scènes comme celle du Cirque sont mythiques, déjà dans "Acté" Dumas restituait sans fioritures les scènes de massacres d'animaux quasiment, on est aux jeux du Cirque et aucun péplum ne peut donner le réalisme de Dumas et puis comme d'autres de ses romans, Dumas analyse les causes de la chute des personnages avec le regard de son époque.

Si Dumas avait rendu plus limpide sa chronologie des évènements qu'il raconte, trop de personnages interviennent et plusieurs ont le même nom, et l'organisation de la république puis celle de l'empire, en même temps il se met dans la peau d'Horace qui raconte des faits qui lui sont contemporains et si Horace écrit pour les générations futures, il n'est pas un historien mais un témoin qui raconte les choses telles qu'il les a vues, si Dumas avait clairement écrit un roman où il aurait été le narrateur, il aurait peut-être mieux expliqué l'organisation du pouvoir romain, puisqu'il se présente comme traducteur du manuscrit d'Horace, il suit le manuscrit à la lettre, un effet de réalisme qui ne lui permet pas (ou moins) de s’approprier les personnages. Ce roman reste intéressant par la manière dont il montre les personnages historiques et nous les fait voir d'un autre œil.