Fille de Rien
de Sylvain Ricard (Scénario), Arnü West (Dessin)

critiqué par Blue Boy, le 30 décembre 2011
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
Quand les victimes se font bourreaux…
Dans un village français sous l’Occupation, une famille se déchire. La Libération est proche et exacerbe les tensions. D’un côté, ceux qui subissent l’envahisseur allemand tout en pratiquant honteusement le marché noir, de l’autre, Serge, le scientifique de la famille soutenu par son ami allemand Jürgen dans ses travaux de recherche médicale. Entre les deux, Roland, le jeune frère résistant actif qui tentera de protéger Serge des FFI. Et puis surtout Lucienne, l’épouse et assistante de ce dernier, qui subira l’humiliation d’une population haineuse et déchaînée…

Pour ce qui est de la forme, le découpage confère rythme et fluidité au récit. Le dessin est agréable sans être exceptionnel et les couleurs restent sobres, dans des teintes sombres qui collent au contexte. Toutefois, un seul tome n’a peut-être pas été suffisant pour approfondir la psychologie des personnages et développer un thème complexe et toujours un brin sensible aujourd’hui. Du coup, le sujet semble avoir été survolé et presque caricaturé, comme si pour montrer leur compassion (légitime) envers ces femmes, les auteurs avaient dû faire passer les FFI pour des ordures…

Cependant, on leur saura gré d’avoir abordé un chapitre souvent ignoré et peu glorieux de l’Histoire de France (tout comme la Collaboration), celui des femmes tondues à la Libération. Cette pratique machiste et lâche qui permit aux soi-disant « bons français » de trouver un exutoire facile aura laissé des traces chez les victimes, qui n’auront même pas eu le droit de se défendre dans le cadre d’un procès en règle et furent contraintes de fuir la région où elles vivaient, souvent avec un enfant dans les bras.