En marche...
de Séverine

critiqué par Radetsky, le 24 octobre 2011
( - 81 ans)


La note:  étoiles
La Pasionaria parisienne
Caroline Rémy (1850 - 1929), plus connue sous son nom de plume, Séverine, fut la secrétaire de Jules Vallès et veilla notamment à la publication posthume de ses oeuvres . Elle connut la fin du règne de Napoléon-le-Petit, la Commune, la Troisième République. Proche des anarchistes, féministe active et intransigeante, elle a su mener une vie de femme libre malgré les tracasseries, les persécutions policières, les dangers d'une vie engagée tout entière dans le combat pour la justice. Libre dans ses pensées, ses actes, ses amours, au plus grand scandale de la société bien-pensante. Séverine écrit avec enthousiasme, précision, émotion ; mais sa plume est une rapière trempée dans le vitriol ! Rien à voir avec la chronique gentillette d'une dame patronnesse. Rien n'échappe à sa sagacité, à son désir d'éclairer d'un jour sans complaisance l'immense misère qui l'entoure : la faim (et la mort par la faim) des enfants de misérables, l'existence infernale de l'ouvrier (les accidents de la mine), du sans toit, de l'errant, la persécution exercée contre les anarchistes (Américains ou Français) ou les grévistes, les moeurs judiciaires d'atroces magistrats installés dans leur rôles d'inquisiteurs, les combines en tout genre, y compris chez certains "défenseurs" attitrés du bon peuple, bref, une suite de petits essais qui sont le portrait d'une époque qualifiée de "Belle Epoque" par la vulgate imbécile des plumitifs. Le sens de la formule qui fait mouche, le trait incisif, l'image saisissante, la critique aveuglante de vérité : Séverine a écrit avec et pour les pauvres, une version prolétaire des "Misérables" ; là où le père Hugo (qu'elle estime) s'adressait aux bourgeois, Séverine écrit surtout pour les siens, avec la conviction qu'ils en tireront une force nouvelle, elle donne la parole à ceux à qui on la refuse.
Séverine, une grande femme, avec autant de tête que de coeur et de tripes.
L'ouvrage n'a sans doute pas été réédité depuis 1896, je l'ai trouvé chez un bouquiniste pour une bouchée de pain... Internet ??