Princesses d'ivoire et d'ivresse
de Jean Lorrain

critiqué par Pucksimberg, le 12 octobre 2011
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
De magnifiques contes cruels ...
Ce recueil de nouvelles est une surprenante découverte ! Jean Lorrain a finement bâti des contes vénéneux, où l'imaginaire rassurant de l'enfance côtoie la violence décadente propre aux idées de cet écrivain si talentueux et si peu lu. Lire Victor Hugo au lycée est légitime, lire Jean Lorrain est plus ardu à cause de son univers. C'est sans doute pour cette raison que cet auteur n'est pas mis au même rang que certains auteurs dits classiques.

Ce recueil se divise en plusieurs sections dont les titres sont en eux-même magiques : "Princesses d'ivoire et d'ivresse", "Princesses de nacre et de caresse", "Princesses d'ambre et d'Italie", "Contes de givre et de sommeil" ... Ces contes de fées font rêver l'adulte, pas l'enfant. Les contes finissent parfois mal, les princesses sont souvent violentes et passionnées. De plus certains textes sont sensuels, sans pour autant devenir choquants. L'auteur se plaît parfois à disséminer des références religieuses légèrement détournées sous sa plume. Le personnage masculin de "La princesse aux lys rouges" a d'étranges ressemblances avec le Christ.

Dans ce même conte, l'héroïne parvient à tuer violemment des chevaliers en violentant des fleurs. Dans "La princesse au sabbat", une jeune femme éprise de son reflet connaitra un triste sort à cause de son narcissisme. Dans les autres contes, la tête d'un homme est offerte cruellement en cadeau, une princesse est sous verre ... L'univers peint est luxueux, les pierres précieuses, les beaux tissus, les fleurs s'entremêlent et semblent tout droit sortis de l'esprit de Dorian Gray ou de son auteur.

Les scènes sont à la fois esthétiques et dures et envoûtent le lecteur, bercé par le verbe poétique de Lorrain. Un beau moment de lecture.