Les années d'utopie
de Jean-Claude Carrière

critiqué par CC.RIDER, le 20 septembre 2011
( - 66 ans)


La note:  étoiles
Flower Power...
Scénariste de Louis Malle, Milos Forman et Luis Bunuel, Jean-Claude Carrière eut la chance de se trouver aux bons endroits aux bons moments dans les années 68/69 quand le monde connut des évènements qui le bouleversèrent et dont les conséquences se font encore sentir de nos jours. En mars 1968, il était à New-York et y découvrait les hippies, le « Flower Power » et les débuts du psychédélisme (sex, drugs and rock and roll). En mai, d'abord au Festival de Cannes puis à Paris, il était le témoin privilégié de la révolte étudiante avec ses barricades, ses affrontements à coups de pavés entre les étudiants et les CRS, ses drapeaux noirs et rouges déployés, le tout s'achevant avec les accords de Grenelle et la manifestation monstre sur les Champs Elysées. L'année suivante, il se trouvait à Prague, assistant au fameux « Printemps » dans lequel tout un peuple demandait « un socialisme à visage humain », c'est à dire « pas de socialisme du tout » et ne recevait comme réponse que l'écrasement sous les chenilles des chars du Pacte de Varsovie. Et pour finir, il retourna à New-York pour y constater que la Fleur commençait déjà à se faner, les grands espoirs sombraient déjà dans le désenchantement de la drogue et de l'alcool.
Un livre intéressant sur une sorte de bref souffle de folie, une drôle d'utopie qui ne dura que ce que durent les roses « l'espace d'un matin... » en l'occurrence moins de deux années. Toute une jeunesse avait voulu changer le monde presque simultanément, mais de façon différente et même paradoxale. « Cette jeunesse de 1968 ne vieillira pas. Elle est jeune par définition. Pour toujours. » dit l'auteur qui ne se contente pas d'être un témoin privilégié, mais qui tente d'analyser le phénomène de façon objective, sans jugement, ni idées préconçues. Il cite quelques slogans « Prenez vos désirs pour des réalités », « Soyez réalistes, demandez l'impossible », « la Culture est l'inversion de la vie » ou encore « Cache-toi, objet ». Il montre également combien les idées et revendications de l'époque sont toujours d'actualité : refus de la société de consommation, du gaspillage, de la toute puissance de l'argent, désir d'un monde plus fraternel, plus respectueux de l'environnement et de l'humain. S'il n'apprend rien à ceux qui ont vécu cette époque, ce livre très agréable à lire pourra sans doute être fort utile à bien d'autres...