Dans les cités de Charles Robinson

Dans les cités de Charles Robinson

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Hamilcar, le 13 septembre 2011 (PARIS, Inscrit le 1 septembre 2010, 68 ans)
La note : 4 étoiles
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Dérive urbaine

Le titre pourtant m’inspirait. Les cités sont tellement devenues Terra-incognita pour beaucoup, alimentent tant de débats, de fantasmes, voire de certitudes souvent mal renseignées qu’un livre sur les cités, bon dieu mais c’était bien sûr, j’allais en avoir un éclaircissement. D’autant que la 4° de couverture laissait supposer une découverte de l’inconnu, car comme tout le monde le sait, les cités c’est une autre planète à explorer de loin, à travers l’écrit ou l’image, mais toujours en retrait.
Un ethnologue est envoyé dans une cité HLM, Disneyland après la bombe nous précise l’auteur, pour étudier la population, ses mœurs, ses coutumes, les personnalités qui la composent, et tout ça dans un but bien défini, raser le tout pour le reconfigurer plus tard. Cette vision apocalyptique ne doit pas se passer d’une certaine compréhension pour ceux qu’il faudra bien délocaliser. Discours officiels obligent.
L’idée de départ m’a sincèrement séduit, sauf qu’à y rentrer, dans cette cité, j’ai fini par perdre toute ma compassion pourtant réservée à ceux que j’allais découvrir. Dans cette cité-là, les Pigeonniers, il n’y a que caricatures, que renoncement à s’en sortir, que fatalisme incarné par la violence, le sexe ou la magouille. Pas un individu normal croisé par notre cher ethnologue, lui-même issu de la même cité, et dont les qualifications professionnelles s’avèreront être usurpées. L’auteur n’aurait pu, dans sa considération, imaginer le type parvenu à force d’études. Même celui là, il a fallu qu’il triche.
Vous l’aurez donc compris, Dans les Cités est un roman, de fiction bien évidemment. Autant de tarés au centimètre carré, ça ne peut que s’inventer. Le problème est que l’étude de mœurs souhaitée au départ, en toute ignorance certes (le titre, l’ethnologue) se transforme assez vite en vœu véritable. Faut reconstruire si ça existe !
Pour avoir suffisamment été à la rencontre des cités dites sensibles, je présumais qu’une approche moins marginale aurait eu son impact et un profond respect pour ces acteurs du banal ordinaire qui, dans l’étau des délinquances multiples et des déconsidérations extérieures luttent pour exister dignement dans la société. Pas un mot sur les tissus associatifs ou tout simplement pour ceux qui prennent le train le matin pour simplement ramener ou tenter de ramener le salaire salutaire à la famille. Que des dévoyés, des moins que rien, même pas victimes de leur situation. Des volontaires dans leur fange !
Ils sont impersonnels ; blacks, blancs, beurs ? On ne sait pas. Ils se réfugient derrière le masque du superlatif pressionniste, écrivent leur nom comme un tag. L’auteur se garde bien de nous les découvrir ; on pourrait y déceler un soupçon d’humanité et ça foutrait le roman par terre.
On découvre même des incultes ou présumés comme tels vu leurs circonstances aggravantes, déblatérer la langue de Voltaire mieux que dans les quartiers réputés chics. Ils philosophent pour certains, remettent le monde à l’endroit à coup de batte mais en langage choisi.
En deux mots, un roman sans complaisance et surtout sans nuance. Les seuls qui ne dérivent pas sont soit retranchés chez eux, donc absents du roman, soit agressés à la grande surface, celle où se concentrent tous ces bandits manchots.
En fait, j’ai commis l’erreur de croire que ce livre n’était pas un roman avec des personnages délibérément choisis par l’auteur. Je pensais à une chronique ; le titre sans doute. C’est très souvent bien écrit, les mots appellent parfois à la consultation du dictionnaire, ce n’est pas peu dire, mais tout ça est tellement confus.
Ce que je regrette le plus, c’est de n’avoir éprouvé aucune once de sympathie et ce, pour aucun des personnages, même ceux qui subissent véritablement. Tout est là. Même imaginés, ces paumés des cités sont définitivement abandonnés, même par un lecteur qui pensait aller à leur rencontre. C’est bien dommage. Ils resteront cantonnés dans ce Disneyland qui n’a besoin d’aucune bombe pour sombrer dans l’ignorance des autres.

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Les éditions

  • Dans les cités [Texte imprimé], roman Charles Robinson
    de Robinson, Charles
    Seuil / Fiction & Cie
    ISBN : 9782021040463 ; 17,21 € ; 06/01/2011 ; 528 p. ; Broché
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