Nues de Bénédicte Heim

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Sahkti, le 12 septembre 2011 (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans)
La note : 9 étoiles
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Violente sensualité

Quelle mise à nu que ce roman ! Dès les premières pages, le lecteur sent sa peau frissonner, le désir ressenti par l'un ou l'autre des personnages s'insinuer dans ses veines, le souffle devient court et on assiste, observateur fébrile, à cette lente exploration de l'autre, à cette intrusion dans la peau d'êtres qui nous font face et nous accompagnent.

Entre un ancien mannequin devenu auteur de théâtre, un photographe, un artiste-peintre et une jeune modèle à la beauté sauvage, il y a un jeu de rôles qui devient saisissant de puissance et d'émotion, qui fait la part belle au regard et à la place de l'image dans nos vies. Image de nous-mêmes, des autres, sens de la beauté et du désir, mise en forme de celui-ci... autant de thèmes chargés de sensibilité (et de sensualité) que l'auteur restitue par une écriture forte, incisive. C'est un très beau travail d'exploration des âmes que nous livre Bénédicte Heim; un travail qu'elle n'accomplit pas seule car elle emprunte littéralement l'esprit du lecteur pour qu'il la suive dans cette incursion. Auteur et lecteur finiraient presque par ne plus former qu'un tant il est agréable et aisé de s'immerger dans les pensées des protagonistes et leur manière de voir le monde.

Une des particularités de ce roman est sans conteste l'efficacité dans la façon de nous faire ressentir les vertiges liés à la beauté et au désir. On a par moments l'impression que tout tournoie, qu'on étouffe sous la charge émotionnelle liée aux apparences et à la quête de l'absolu. A travers ces désirs, c'est soi-même qu'on cherche et ça peut mener à la folie tant c'est violent. Il est également intéressant de suivre ces personnages pour qui l'image est tout, que ce soit le photographe qui la saisit, Peter le peintre qui tente de l'immortaliser ou Nina la mannequin qui vit par et pour elle. Le parcours de la dramaturge, ancien top ayant usé et abusé des affres du désir et de la beauté, est sur ce point particulièrement bien mené et réussi.

Le rapport au corps est évoqué, à pleines pages, dans tout ce qu'il peut avoir de magnifique ou de révoltant. Les émotions se font primaires, on se sent entièrement mis à nu. Cela peut faire mal mais aussi apporter beaucoup de bien, tant l'écriture de Bénédicte Heim est belle et sans concessions.
Les mots se mêlent, s'entremêlent et se répètent, jusqu'à épuisement des sens. Superbe !

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