Léa ne se souvient pas comment fonctionne l'aspirateur
de Eric Corbeyran (Scénario), Gwangjo (Dessin)

critiqué par Dirlandaise, le 31 août 2011
(Québec - 68 ans)


La note:  étoiles
Le choix de Léa
Je raconte un petit bout de l’histoire : Louis, un écrivain raté dans la quarantaine rentre chez lui. Il constate qu’un chat a renversé la poubelle de son immeuble et entreprend de ramasser les dégâts. Il découvre parmi les immondices toute une panoplie de modes d’emploi pour appareils ménagers mais sa découverte cruciale, celle qui changera sa vie, c’est le journal intime de Léa sa voisine tout récemment déménagée. L’homme rentre chez lui avec sa trouvaille et se met à lire les confidences que la jeune femme a couchées sur le papier afin d’échapper à la folie et au désespoir. Léa devient alors l’obsession de l’écrivain qui mettra tout en œuvre afin de la retrouver.

Très belle histoire que celle de Léa. Toutes les femmes devraient la lire car elle raconte la façon dont une femme peut être complètement détruite par le mariage et la pression sociale qui l’accompagne. Les dessins de Gwangjo sont d’une incroyable douceur, son trait est fin et les visages de même que les décors sont fort bien exécutés. On sent un amour profond pour ce qu’il fait et cela transparaît dans ses dessins. Pas de couleurs, ce sont des esquisses qu’on dirait faites au crayon de plomb. Certaines sont admirables alors que d’autres sont un peu bâclées mais il demeure que c’est un beau travail. Léa est très belle, d’une beauté toute simple et lumineuse. Elle est touchante de vulnérabilité. J’ai senti chez elle un profond désir de reprendre sa vie en main mais elle est si détruite que cela s’avère quasi impossible et au-dessus de ses forces. Plusieurs femmes se reconnaîtront en Léa et c’est tant mieux car il faut dénoncer sans cesse cet enfer conjugal, ce piège immonde dans lequel tant de femmes se laissent entraîner croyant trouver le bonheur. Le scénario n’est pas parfait, il comporte quelques faiblesses mais cela n’entame en rien le message profond que cet album véhicule.

J’accorde une bonne note pour ce travail précieux qui j’espère saura toucher le cœur de beaucoup de lecteurs car il a su toucher le mien.

« Ce journal qui vous a tant ébranlé et que je tenais avec une régularité de métronome n’était pas la chronique d’une rebelle ordinaire. C’était un paravent, une protection – la seule – contre la folie qui me guettait à chaque instant. Vous vous êtes trompé, Louis. Je n’étais pas une insoumise, je n’étais pas une révolutionnaire, j’étais tout le contraire. J’étais une victime, une victime ordinaire… »