Fatigue du sens de Richard Millet

Fatigue du sens de Richard Millet

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités

Critiqué par Aktukritik, le 23 août 2011 (Nantes, Inscrit le 23 août 2011, 38 ans)
La note : 10 étoiles
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L'impossible existence nationale

Fatigue du sens est un essai rédigé par Richard Millet et publié au mois de mai 2011 aux éditions Pierre-Guillaume de Roux. Alternant brèves réflexions lapidaires et anecdotes personnelles, cet analyste prend soin de dévoiler, démasquer et ausculter les rouages d’une immigration de masse extra-européenne qui a selon lui, dégradé l’identité française de tradition hélléno-chrétienne. Considérant que le capitalisme marchand détruit les identités parce qu’elle réduit les personnes à des individus interchangeables, favorisant ainsi le communautarisme grâce à une gauche qui a institué « Un Nouvel Ordre Moral », « un antiracisme d’état » nécessaire à la bonne circulation des immigrés sur le territoire français.



1/ L’horizontalité: un principe actif du monde post-moderne

Professeur de français dans les années 1980 dans la banlieue sud-est de Paris, il prit conscience de sa progressive incapacité à instituer et référer à un seuil de connaissances commun dû à l’accroissement du nombre d’immigrés. Confronté à des revendications communautaires d’immigrés extra-européens, il devint impossible de dire « nous », d’où cette solitude du professeur, enfermé dans une identité et une histoire française qu’il ne pouvait transmettre. Assistant à une inflation du nombre d’élèves immigrés dépourvus de repères historiques français, Richard Millet ne peut que constater que ce vide fait le lit d’un capitalisme hédoniste prenant la forme de « sous américains » en quête d’identité. Il affirme P 64 « C’est dans l’enseignement que tout s’est joué. J’ai constaté que l’échelle historique s’était effondrée et que privés de repères, les élèves flottaient dans une temporalité si vague qu’elle faisait le lit d’un monde horizontal. »

L’horizontalité résulte d’une immigration qui engendre la destruction des repères historiques communs qui font que chaque citoyen se reconnaît dans l’Autre parce qu’il partage avec lui, une histoire, une langue et des valeurs communes. Ainsi, elle est l’expression même du libéralisme puisqu’elle réduit l’individu au consumérisme et privé de repères. Mais la perversité de l’horizontalité réside dans la revendication obsessionnelle de droits de la part des immigrés puisque tout se vaut, tout est équivalent, culture littéraire et « cultures de banlieue » alors qu’elle ne sont, selon lui, qu’une dégradation d’une langue noble, et une gesticulation frénétique et inculte calquée sur le modèle des ghettos américains et favorisée par une gauche couarde car inapte à imposer un modèle de référence. Or, la verticalité fut pour cet essayiste, l’expression même de l'assimilation puisqu’elle permettait d’abdiquer une identité passée au profit exclusif d’une nation par l’adoption de fait de sa culture que l’on faisait sienne. Ainsi, la soumission des immigrés aux principes républicains français, permettait l’universalisme et le rayonnement de sa nation. Mais, il pointe du doigt une troisième génération d’immigrés qui ne se sent ni originaire d’Afrique, parce que n’étant jamais allée dans le pays de leurs grands-parents, vivant en banlieue et revendiquant des droits d’une communauté qu’ils méconnaissent tout en recherchant l’immédiate satisfaction de leurs désirs consuméristes. Affirmant l’incompatibilité de la culture arabo-musulmane avec la culture occidentale hélléno-chrétienne, il se sent étranger dans un pays peuplé de nombreux étrangers, ce qui le conduit à « un apartheid volontaire ».

2/ Fatigue du sens: l’impossible existence nationale

Richard Millet promeut la pureté des identités nationales en tant qu’elles révèlent l’essence même d’un pays. Or, il voit dans la France, un pays de servitude volontaire. Ostracisés, selon lui, les français, blancs, catholiques sont irrépressiblement répréhensibles car suspectés de racisme et condamnés à vivre dans un non lieu puisqu’ils n’appartiennent à aucune communauté particulière, hormis celle des indigènes à qui on a imposé de nouvelles règles. Fustigeant, cette dictature de l’antiracisme, il écrit P 74 » d’une certaine façon, l’antiracisme finira par jeter l’opprobre sur ceux qui, n’appartenant à aucune minorité « visible » ne sont que des Français de souche et déjà discriminés au sein de l’indifférencié consensuel ». Accusé de racisme Richard Millet, serait inepte et simpliste. Il faut y voir l’écriture d’un désespoir contemporain et l’exaspération d’un écrivain qui cherche dans l’écriture la perfection de la langue française comme ultime espoir de préserver ce qui reste du patrimoine français.

Admiratif des différences culturelles, il reconnaît la qualité et la noblesse des autres civilisations lorsqu’elles savent préserver leur histoire. On peut lire P106 « j’aime l’idée d’être un pur français: que pourrais-je être d’autre? J’aime la pureté où qu’elle se trouve et me suis toujours méfié du discours sur l’impur comme valeur ». Face au politiquement correct qui assimile l’idée de pureté nationale au nazisme, il est impossible de défendre cette valeur qui favoriserait l’assimilation des étrangers à la nation française. Le politiquement correct affirme selon lui, une injonction « le métissage généralisé » qui détruirait l’essence nationale des indigènes et feraient d’eux des immigrés sans droit de cité et obéirait ainsi à la logique libérale qui recherche la destruction des frontières propice au consumérisme.

L’authenticité du discours de Richard Millet le conduit a affirmé P117 « j’aime qu’il y ait d’autres peuples et n’en juge aucun supérieur aux autres, même si j’en estime certains plutôt que d’autres pour des raisons culturelles, esthétiques, historiques et religieuses. Préférence qui suggère que les peuples doivent rester eux-mêmes » L’authenticité d’une nation est à l’identité ce que le peuple est à sa langue, la vertu et l’épaisseur d’une intelligence collective qui l’immunise contre les dictatures trompeuses que prennent selon lui le visage du " droit de l‘hommisme et l'humanitarisme » pour servir les intérêts du Marché.

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Un livre à lire sans préjugé pour sa qualité esthétique, dans une syntaxe parfaite et une recherche de la complexité signifiante.

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