Les Anneaux de Saturne
de Winfried Georg Sebald

critiqué par Oscar W., le 21 juin 2002
(Bruxelles - 55 ans)


La note:  étoiles
Un voyage dans l'histoire
Il est clair que la promenade est conseillée pour se tenir en forme, mais ce que l'on découvre dans ce livre, c'est qu'elle est également formidable pour la mémoire. En effet, le héros de ce livre se promène durant plusieurs semaines sur la côte est de l'Angleterre dont le décor est souvent dessiné par d'anciennes villes désertées depuis longtemps ou par des endroits plutôt désertiques. Lors de ce périple, le promeneur se souviendra de certains épisodes de sa vie personnelle mais surtout de faits historiques qui ont marqué notre monde. Sciences, art, politique, économie, tous ces sujets sont racontés soit sous forme étendue, soit sous forme anecdotique mais à chaque fois avec une écriture splendide et poétique. Toutes mes félicitations au traducteur. Chose rare, le texte est agrémenté de petites photos noir et blanc qui donnent un résultat délicieux sur ce fameux papier qu'Actes sud a adopté depuis longtemps. Un régal pour les yeux, l'esprit et la sensibilité des lecteurs
les anneaux de mémoire 9 étoiles

"Les anneaux de saturne sont constitués de cristaux de glace vraisemblablement mêlés à des particules de météorites qui tournent en bandes circulaires dans le plan de l'équateur de la planète.." Texte en exergue du livre. Ce livre est constitué de souvenirs de météorites de mémoire qui tournent dans la tête de W.G. SEBALD. Composé sur un lit d'hôpital un an après son périple pédestre sur la côte est de l'Angleterre nous partons dans les errances du crâne de Thomas Browne, passons par la leçon d'anatomie... puis montons dans l'autorail diesel pour aller sur cette côte est, désolée, abandonnée, solitaire. Evidemment cela nous rappellera la pêche du hareng, la sailor's reading room, la destruction du jardin Yuanmingyuan, la chasse et l'élevage des faisans, Chateaubriand, la sériciculture et les maladies psychiques des tisserands. Ne voyez pas d'ironie dans ce propos, tout se tient dans cette longue promenade. Rien d'ennuyeux. A la fois récit de voyage, notes d'une grande érudition sur les endroits traversés, fragments autobiographiques également, voilà un voyage plaisant et des rencontres insolites et agréables. Ouvrage d'une grande originalité par la diversité des genres et d'une écriture tellement souple, vivante (bravo aussi au traducteur !) nous percevons à la fin du périple le lien entre tous ces anneaux de mémoire : l'Homme capable de grandes réalisations, de superbes constructions s'emploie tout autant à les détruire.

Lectio - - 75 ans - 12 mars 2012