Les yeux de Lira
de Eva Joly, Judith Perrignon

critiqué par Noir de Polars, le 14 juin 2011
(PARIS - 56 ans)


La note:  étoiles
"Les Yeux de Lira", un hymne vibrant à l'utilité du recyclage.
Le quatrième de couv annonce fièrement: "Avec « Les yeux de Lira », le duo Eva Joly-Judith Perrignon s’attaque au polar avec jubilation et plonge le lecteur dans une véritable course-poursuite, sans retour possible".
C’est faux, et fort heureusement ! Le lecteur a un « retour possible », une carte stop, il peut tout simplement refermer ce bouquin avant de s’être par trop ennuyé à le lire jusqu’au bout, et l’emmener directement vers sa destination naturelle, un centre de recyclage : on est écolo, ou pas, fichtre ! Il peut aller aussi jusqu’à ne pas l’acheter, acte encore plus citoyen, ce qui lui évitera le déplacement vers les bennes.
Qui a vraiment écrit ce navet, Mystère. Quoique. La recette est on ne peu plus simple, en fait : l’une a bricolé un vague thriller politico-financier, glissé quelques anecdotes tirées de son ancien métier, et l’autre a mis en forme.
Disons le tout de suite, le travail de mise en forme est honnête. Pas transcendant, mais honnête. Quelques fautes de style, mais on a vu bien pire.
C’est le fond qui pose problème dans ce livre : une fois qu’on a dit, redit, rabâché, que les riches étaient pourris, que le parquet l’était également (Eva Joly, ancien juge d’instruction hait et méprise à la fois les procureurs et plus généralement l’intégralité de son ancienne hiérarchie) et qu’on a truffé le récit de ficelles financières faciles et connues même du paysan du Rouergue, on fait quoi ? Comme il faut tenir 317 pages (pour vendre un navet 19,80€, il faut tout de même ça) on reprend depuis le début, on invente quelques nouveaux personnages, et on touille à nouveau.
Le livre a néanmoins un mérite, un seul ; il nous renseigne utilement sur la dose de bile rentrée d’Eva Joly .
Tout le livre tient dans cet échange verbal (p 73) , un bien dans l’air du temps, un bien courageux et qui fera à n’en pas douter progresser la justice dans le monde :
- « Et pendant que vous y êtes, signez la commission rogatoire ! Au moins, vous saurez pourquoi vous vous faites engueuler, tente encore Félix.
- On va trouver quoi ? des entourloupes de milliardaires mais rien sur ce qui s’est passé. Les riches aussi se noient !
- Mais seuls les pauvres ne savent pas nager !

C’est beau, hein? Ah c’est sûr, le monde est mal fait, que voulez-vous c’est ainsi depuis la nuit des temps, et ce ne sont pas les larmes faciles d’Eva Joly qui le fera avancer dans le bon sens.
On peut comparer cet « ouvrage » aux deux premiers Sulitzer, « Money » et « Cash » .Même veine, sauf que ces deux-là réservaient au moins leurs moments d’humour. Ici, même pas. Ils étaient aussi empreints d’un certain optimisme. Ici, behh…