Il faut sauver le petit-bourgeois
de Jacques de Saint Victor

critiqué par CC.RIDER, le 19 mars 2011
( - 66 ans)


La note:  étoiles
L'horreur économique
Tous ou presque nous sommes des petits bourgeois que nous le voulions ou non. Le petit bourgeois est le prototype de la classe moyenne, il est partout où ne règne pas la misère absolue et où l'aisance est toute relative et de plus en plus érodée pour ne pas dire menacée de disparition. L'ultra libéralisme, les crises économiques et sociales à répétition le menacent de paupérisation galopante d'autant plus facilement que tout le monde le dénigre et qu'il n'est même pas fier de ce qu'il est. C'est le mouton noir, le bouc émissaire. Pour la gauche, il incarne la honte de la civilisation occidentale, le beauf, le facho, le macho et le raciste. Pour la droite, il n'est qu'un mouton craintif, hypocrite et corporatiste tout juste bon à passer à la tondeuse. Comment en est-on arrivé là ? Trente années d'une idéologie pervertie ont transformé l'activité économie mondiale en « économie casino » disait Maurice Allais. Les riches se sont enrichis de façon indécente (ainsi Ray Irani, le patron d'Occidental Petroleum, a pu se verser un salaire de 320 millions de dollars en 2007 soit 154 000 dollars de l'heure !) alors que les pauvres sont devenus de plus en plus pauvres et que le petit bourgeois a vu ses revenus régresser, la précarité s'installer et son statut social s'effondrer.
Une très bonne analyse économique, sociologique et politique d'un phénomène causé par la montée au pouvoir des néo-cons aux USA et initié en France dans les années 80 par les socialistes de la Mitterandie qui, dans cette trahison de leurs « valeurs » y ont perdu toute crédibilité. Le règne du pognon roi avec toutes ses conséquences sociales : abandon des modèles toscans et rhénans, retour au capitalisme sauvage à la Dickens ou Zola est le résultat d'une suite de choix politiques calamiteux qui remontent en fait à plus de deux siècles. Le verdict est donc sans appel : c'est une condamnation totale et sans circonstances atténuantes, présentée de façon agréable, brillante et solidement argumentée. Reste les solutions pour sortir de cette horreur économique et sociale qu'est la globalisation (stade ultime du jacobinisme, du capitalisme, du communisme et de tous les totalitarismes) et là, l'auteur se montre léger et plutôt pessimiste. Il prêche pour un retour au bon sens, à la solidarité et à plus de justice sociale en prenant à témoin un personnage inattendu, le prince Charles : « Adopter ce qu'il y a de meilleur dans le monde moderne, sans renier les principes intemporels dont nous avons hérité, ces principes d'identité locale, de justesse, de proportion et, si j'ose dire de beauté. Ce sont ces principes qui ont été sacrifiés sur l'autel de la « modernité » ou de l'avant-garde et qui, pourtant, « reflètent le plus sûrement notre vraie humanité et notre civilité ». Une sagesse du grand écart qui ne risque pas d'intéresser les masses chinoises, indiennes ou africaines ne rêvant que d'une seule chose : consommer elles aussi ! Livre intelligent et intéressant qui pose les vrais problèmes mais sans présenter les véritables solutions (sans doute trop drastiques pour l'auteur et inimaginables pour les coquins qui sont au pouvoir).