Le Jardin de Picpus
de G. Lenotre

critiqué par Tanneguy, le 14 mars 2011
(Paris - 84 ans)


La note:  étoiles
Une promenade extraordinaire
Théodore Gosselin Lenotre (qui a toujours signé ses ouvrages G. Lenotre), de l'Académie Française, mort en 1935, a écrit de nombreux ouvrages très documentés sur la Révolution de 1789. C'est un historien reconnu, consciencieux, travailleur, même si les références sont rares dans ses livres : autre façon de travailler, que les historiens contemporains ne manquent pas de remarquer, tout en reconnaissant qu'il fut un des meilleurs connaisseurs des Archives Nationales de cette période.

Ce préambule n'a pour but que de souligner l'intérêt que devrait prendre le lecteur à ce livre qui retrace une période mal connue de notre Révolution, celle que l'on a appelée La Grande Terreur, et plus précisément les quelques mois qui ont précédé la chute de Robespierre en juillet 1794. Les tueries s'accélèrent, la guillotine déménage de la place de la Révolution (aujourd'hui Concorde) vers celle du Trône Renversé (aujourd'hui Nation) et il faut bien trouver un endroit pour se débarrasser des dépouilles qui s'accumulent au rythme de plusieurs dizaines par jour, neuf jours par décade ( le repos du Saigneur ?). On creusera deux fosses communes dans un jardin proche clos de hauts murs, Picpus. Cet endroit sera préservé grâce à quelques descendants de suppliciés et fait encore l'objet d'une ferveur constante. Certains se font encore inhumer aujourd'hui, on y trouve la tombe de Lafayette, dont l'épouse était née Noailles.

C'est cette histoire que nous conte G. Lenotre en s'intéressant particulièrement à la famille Noailles qui a payé un lourd tribut aux évènements et qui a vraisemblablement communiqué à l'historien ces archives. On suit avec émotion le trajet des condamnés depuis leur arrestation, de leur incarcération, leur jugement expéditif précédant de peu leur transport vers le lieu de l'exécution dans les sinistres charrettes. Il termine son ouvrage en donnant la liste des 1306 guillotinés inhumés à Picpus et dont les noms sont gravés dans la chapelle actuelle. Ce sont les rares victimes à avoir une sépulture reconnue à ce jour, car les charniers de l'époque (cimetière de la Madeleine à l'emplacement de la Chapelle Expiatoire notamment) ont été rapidement "nettoyés", les restes étant déversés dans les Catacombes.

Un récit émouvant émaillé d'anecdotes, comme Lenotre a l'habitude de procéder, qui serait utile aux adolescents d'aujourd'hui pour relativiser l'enseignement partiel et partial que leur dispense l'Education Nationale de nos jours.

Je me suis procuré ce livre à Picpus ; je ne sais s'il a fait l'objet de rééditions.