Au poisson qui fume de Dominique Segalen

Au poisson qui fume de Dominique Segalen

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Lazercat, le 28 février 2011 (Haine-Saint-Pierre, Inscrit le 28 décembre 2008, 45 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (39 864ème position).
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Barbie aux Pays-Bas, livrée avec vitrine amovible

Quatrième roman de Dominique Segalen, "Au poisson qui fume" est un livre à l'onirisme très marqué qui se déroule dans le "Red Light Sector", haut lieu amstellodamois de la prostitution.
Louisiane, petite Française affectivement désoeuvrée, y atterrit par hasard dans une maison de tolérance. D'une candeur virginale étonnante et animée d'un puissant désir de se donner un corps, elle y côtoiera des collègues hautes en couleur dotées d'une vision très prosaïque de leur métier.
C'est dans ce petit monde interlope, ronronnant de la tendre vision du monde de l'héroïne, que l'apparition, de l'autre côté des vitrines, d'un chaland d'une beauté estomacante va faire basculer le cours de leurs vies. Fatalement attirées par ce dernier, les pensionnaires décident assez hardiment de le kidnapper afin de l'utiliser comme objet sexuel.
Décalée, Louisiane, plutôt intimidée et touchée par la grâce de cet homme, prend le parti de ne pas y toucher, mais de s'adresser à lui de l'autre côté des vitres sans tain qui l'emprisonnent. Et c'est dans cette relation naissante que Louisiane espèrera trouver la tendre attention d'une écoute...
...jusqu'à un vertigineux dernier chapitre! Cet ouvrage pose un certain regard féminin (Domonique Segalen est une femme) sur la prostitution, ni misérabiliste, ni complaisant. Cependant, et ce sera mon principal reproche, ce roman a le défaut de sa qualité majeure: essentiellement esthétique (mais sans les longues descriptions que j'abhorre tant), très onirique, voire carrément atmosphérique, il est sans réelle substance thématique, exactement comme un rêve.
Les états d'âme des praticiennes du plus vieux métier du monde sont ingénieusement étudiées au travers des situations rencontrées par notre esclave sexuel, mais il manque beaucoup d'un principe moral, d'un développement de thèse qui pourrait pousser le lecteur vers l'élévation de soi. Par contre, si une fin convenue est longtemps attendue, on est d'autant plus bluffé par le dénouement de ces quelques deux cents pages.
3,5 étoiles car le final et l'ambiance générale valent à ce livre de mériter une lecture plus que curieuse.

Allez un petit bout de la page 146, pour vous donner une idée du substrat :
"
Pour s'apaiser, elle ouvre le manuel de bridge au hasard:
Jouez le valet, l'As prendra la dame plus tard, dit le texte.
Elle sourit.
C'est bien ce qu'elle pensait.
Luc lui a avoué qu'il ne se savait pas si réceptif, c'est bien vrai. Il pourrait ajouté qu'elle a piqué sa curiosité avec sa manière de réinventer pour lui un langage d'amour.
L'écran noir de leur projection privée révèle de plus en plus vite les mondes adjacents qui flottent à la lisière du réel. Dire qu'il trouvait les relations limitées, dans un couple.
"

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8 étoiles

Critique de Bafie (, Inscrite le 19 juillet 2004, 62 ans) - 8 août 2017

Une jeune provinciale naïve au look improbable débarque à Amsterdam « Au poisson qui fume » maison de prostitution autogérée par ses dames. Passée leur surprise, ces dames protègent la nouvelle arrivée et l’intègre dans leur équipe. Quelque temps après un chaland perturbe la vie des occupantes de la maison en flânant devant leurs vitrines.
Dans les premières pages, le récit surprend, il est tellement invraisemblable. Ne vous laissez pas décourager, peu à peu, d’autres teintes viendront le nuancer : oniriques, fantastiques, tendres et poétiques.
Un conte sans héros aux personnages attachants que nous voyons grandir et s’affirmer au fil des pages.
La prostitution omniprésente en toile de fond n’est considérée ni avec complaisance, ni d’un œil suspicieux, elle constitue le décor voilà tout, de toutes manières le récit est tellement éloigné du réel que tout propos moraliste ou revendicatif n’y a pas sa place, quoique, en filigrane, l’auteure nous livre quelques amorces de réflexion.
Le dénouement renoue avec le réel, les deux personnages se livrent et nous pouvons découvrir leurs origines, rire, pleurer, frissonner avec eux et leur souhaiter bon vent.
C’est le deuxième ouvrage de madame Segalen que j’ai l’occasion de lire et cet auteure me ravit par son inventivité, sa tendresse, sa fantaisie, son humanité ; je programmerai rapidement un rendez-vous avec l’un de ses ouvrages.

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