Le sursis, Intégrale
de Jean-Pierre Gibrat

critiqué par Nothingman, le 12 décembre 2010
(Marche-en- Famenne - 44 ans)


La note:  étoiles
Fenêtre sur cour
Attention chef d’œuvre. ! Et pourtant, je n’aime pas trop utiliser ce terme un peu trop galvaudé ces derniers temps. Il faut se précipiter sur cette bande dessinée où l’on passe vraiment par tous les sentiments.
Julien Sarlat, amoureux de la belle Cécile, se voit contraint de passer une année terré dans le grenier d’une maison du centre du village de Cambeyrac, un petit village typique du Sud-Ouest. Tout ceci afin d’échapper au service du travail obligatoire mis en place par l’occupant allemand durant la seconde guerre mondiale.
Passé pour mort, suite à l’explosion du train duquel il s’est échappé, Julien, le déserteur, peut ainsi observer en cachette, derrière ses volets, le petit monde qui grouille sous ses pieds dans ce petit village aveyronnais sous l’Occupation… Rien ne va lui échapper, pas même son propre enterrement. L’idée est excellente. Grâce à ce héros scrutateur, disposant d’une vue à 180° sur son village, qui tient un peu du James Stewart de « Fenêtre sur cour » d’Hitchcock, on observe tous les comportements de ces villageois face à l’occupant. Le café du centre est évidemment le lieu de vie de ce petit village. Heureusement qu’il y a la belle Cécile, élan de fraîcheur et de beauté au sein de ce village. Les sentiments entre ces deux héros sont d’ailleurs très bien rendu. Pas question ici d’une simple amourette. Dans Le Sursis, malgré la trame amoureuse, il n'y a ni romance, ni fantaisies, ni divagations. Malgré une part importante de lyrisme, on reste accroché aux dures réalités de la guerre. Un an de la vie d’un petit village confronté aux horreurs de la guerre. La résistance face aux collabos, ceux qui autrefois ont fréquenté les mêmes bancs d’école, se déchirent aujourd’hui.
Le graphisme est impeccable, le dessin est une véritable merveille. Les détails sont rendus avec un réalisme époustouflant. Ainsi le dernier regard du résistant à Julien au moment d’être arrêté par les miliciens. Le regard de Cécile qui retrouve Julien dans sa grange alors qu’elle le croyait décédé. C’est ce rendu parfait d’instants précis qui fait aussi qu’après avoir été un classique instantané de la collection « Aire libre », cette magnifique BD fait aujourd’hui partie des classique de la BD tout court.