Du passé faisons table rase
de Thierry Jonquet

critiqué par Clubber14, le 22 novembre 2010
(Paris - 44 ans)


La note:  étoiles
Est-il possible de se désunir de son passé?
Présentation de l'éditeur :

Le passé n'oublie rien. Il y aura toujours un ancien pour se souvenir. Une femme pour témoigner. Un enfant qui racontera... Dix ans après les faits, en France, dans les années quatre-vingt, le seul homme à " savoir " voit ressurgir le risque que la vérité n'éclate. Cette vérité concerne le Parti. Elle vise le leader, l'homme charismatique à la jeunesse méconnue. Quels furent ses positions et ses actes dans les années de guerre avant qu'il ne milite ? Comment faire taire l'inacceptable alors qu'un corbeau semble à nouveau déterminé à rouvrir les plaies ?

Quatrième de couverture :

Comprenant que le fait d'être membre de l'avant-garde de la classe ouvrière ne pouvait que lui être bénéfique pour sa promotion sociale à l'intérieur de l'usine, René adhéra au Parti. Le 22 avril 1947 : il venait tout juste d'atteindre ses vingt-sept ans. Et l'on vit bientôt le jeune Castel vendre l'organe central du Parti sur les marchés de Montmartre ou de Saint-Ouen, le dimanche matin. Cet être fragile, plein d'amertume à l'encontre de son enfance misérable, déjà marqué par les épreuves de la guerre, le Parti allait le transformer, lui donner cette belle assurance, cet allant imperturbable que tout le monde lui reconnaît. Mais le chemin est encore long, qui fera de ce militant obscur et sans grade le secrétaire général du Parti, lors du Congrès de 1972.

Mon avis :

Une fois encore Jonquet me bluffe, par son style, par sa forme et ici surtout par les faits relatés. L'histoire est celle d'un homme politique qui essaie d'effacer son sombre passé pour assouvir son pouvoir. Rien d'anormal me direz-vous? Et bien ici le passé est plus que glauque puisque c'est de collaboration qu'il s'agit.
Un des leaders d'un parti (non cité par l'auteur mais qui est le parti communiste comme il l'avoua à l'époque de la rédaction de son ouvrage) a été collaborateur pendant la seconde guerre mondiale et aujourd'hui son passé le rattrape. Il va donc tout faire pour étouffer (sans se priver d'assassiner au passage bon nombre de spectateurs de l'époque) ses casseroles. Jonquet tire à boulets rouges sur les bassesses d'une certaine catégorie d'hommes politiques. Il n'est pas rare (pour ne pas dire fréquent) d'apprendre par les infos que des dessous de tables ont circulé, emplois fictifs, élections truquées... j'en passe et des meilleures. L'auteur se retrouve donc dans ce roman, poignant, au coeur de cette enquête dans laquelle une jeune partisane va découvrir le terrible secret et dès lors courir un grand danger.

Jonquet fut plébiscité par les critiques à la sortie de cet ouvrage et il faut bien reconnaître que ce fût fort courageux de sa part (n'étant pas à l'abri d'un quelconque assassinat) que de l'écrire.

Ce roman ne plaira peut-être pas à tout le monde car le sujet est politico-criminel sans investigation policière ni gros rebondissements. Néanmoins il est fort bien documenté (les noms des protagonistes et du parti ayant été toutefois masqués) et les faits sont réels. J'ai grandement apprécié le caractère réel (puis-je dire palpable?) de la situation, imaginant complètement qu'un Le Pen ou qu'on Goelnich puisse aujourd'hui être inculpé (ou du moins présumé) de collaboration il y a 70 ans. Sans en arriver à l'extrémisme d'une collaboration avec les nazis, ce livre reflète le caractère "sans scrupules" des hommes politiques de tout bord qui n'hésiteraient pas une seconde à vendre leur mère pour une voix, et à la livrer pour une autre.