Jacques Sadoul est à la fois anthologiste, directeur de collection, directeur littéraire, créateur du prix Apollo, écrivain de romans policiers (il a remporté le Grand prix de littérature policière avec « Trois morts au soleil ») et de science-fiction. Le Cycle du domaine de R., dont « La passion selon Satan » est le premier tome, se rattache à ce dernier genre.
Edité la première fois en 1960, ce livre se compose de 3 parties dont les personnages, jeunes adultes à peine sortis de l’adolescence, sont les héros. La première partie raconte l’histoire de Josette Reuil, une belle jeune fille aimée par ses parents, appréciée de ses amis, bonne écolière, sans problème aucun. Sauf qu’elle s’est suicidée et qu’elle était enceinte. C’est vrai qu’au cours des deux derniers mois, elle avait changé. Son regard surtout, qui paraissait froid et trouble. La nuit, ses parents étaient réveillés par ses hurlements de terreur et de souffrance. Dans son journal intime, il semble que tout ait commencé par ce qu’elle appelle des « absences » : elle prenait son scooter pour aller à la bibliothèque de la ville voisine, et tout d’un coup, se rendait compte qu’elle était dans les parages du mystérieux domaine de R., à la sulfureuse réputation : son châtelain serait sorcier, et on raconte déjà qu’au Moyen-Age déjà, des filles ayant disparu auraient été retrouvées mortes sur une table d’opération, le ventre ouvert, dans une salle du manoir, et que les villageois qui avaient voulu brûler cette horreur avaient allumé un feu qui ne prenait ni sur les murs, ni sur le maitre du domaine…

J’apprécie chez Jacques Sadoul son style direct et sans apprêt, son humour, son imagination. Il évoque dans un langage clair et précis, sans description inutile, des histoires qui paraissent plus ou moins liées entre elles, privilégiant l’avancée de l’histoire. En moins de 200 pages, nous visitons plusieurs mondes, suivons plusieurs destins, assistons à la création d’un monde et à la destruction d’un dieu. Sadoul nous propose une explication du monde que l’on connait (« le monde réel ») et ses liens avec le « monde du Rêves » en puisant dans les folklores de la sorcellerie, de l’alchimie et de l’astrologie (d’ailleurs, la majeure partie des noms de chapitres sont relatifs à ces domaines occultes). L’ensemble forme un « monde » dans lequel on prend vite ses repères, dans lequel on peut se projeter facilement, et fournit les éléments pour constituer un tout cohérent, une finalité, un dessein, aux histoires évoquées en parallèle.
C’est un livre vraiment agréable à lire, haletant, souvent drôle, un peu sadique et érotique, qui nous emmène voyager sur les territoires des Rêves… et des Cauchemars !