Comment guérir un fanatique
de Amos Oz

critiqué par Nance, le 23 août 2010
( - - ans)


La note:  étoiles
Me retrouve peu dans son raisonnement
Ce recueil rassemble la transcription de trois conférences données en Allemagne par l’auteur israélien en janvier 2002 (c’est-à-dire, relativement peu de temps après la tragédie du 11 septembre 2001) : Se glisser dans la peau de l’autre, Comment guérir un fanatique et Un conflit entre deux causes justes.

Des conférences ayant comme propos le fanatisme, le conflit israélo-palestinien et sa vie d’écrivain aussi. Étant donné que c’est des conférences, ça a un style oral, c’est fluide, mais j’ai aussi trouvé que ça manque de concision, de clarté. Son amour pour les digressions n’aide pas. L’auteur puise dans son passé pour nous dénicher des anecdotes, ce qui donne un ton très familier, intime, mais parfois j’avais de la difficulté à savoir où il voulait en venir.

Il a un point de vue intéressant, j’aime son calme, son humour, de vouloir comprendre l’autre, mais en général, je suis moyennement d’accord avec sa façon de penser. Je ne connais qu’en surface le conflit israélo-palestinien, alors je ne peux pas vraiment en discuter, mais je vais parler de certaines logiques de l’auteur qui m’ont fait une étrange impression.

Il dit souvent que ce conflit est l’affrontement entre le bien et le bien, de deux causes justes, je trouve que c’est bien dit, dans le sens de dédiaboliser un parti ou l’autre, qu’ils ont leurs raisons, mais je trouve encore que ça sonne mal dans les faits quand on voit des gens borner s’entretuer de dire que c’est le bien contre le bien.

Que la solution est dans le compromis, ça serait évidemment ce qu’il y a de mieux, seulement le passé nous a appris que la plupart du temps un conflit se résout par l’autre le nez au sol. Un douloureux divorce équitable ? Sans aller dans les embrassades et le pouvoir de l’amour sur la mort, je trouve ça tout aussi idéaliste. D’ailleurs, je trouve que sa vision est tranchée à plusieurs reprises sur de comment la résolution du conflit devrait être. Ça m’a fait rire quand il dit que les autorités ne devraient rien signer pour arrêter le conflit si le sort des réfugiés n’a pas été discuté. Euh... me semble que n’importe quelle entente qui pourrait cesser le conflit serait un pas en avant, mais bon c’est juste ma façon de voir les choses.

Et comment guérir un fanatique ? Après tout, c’est le titre du recueil. Il y a l’imagination, le sens du relatif, se voir à travers l’autre (la fameuse règle d’or), le sens de l’humour, l’autodérision... Comment essayer de donner le sens le l’autodérision à un fanatique ? Il se sentirait plutôt attaquer si on essayerait de lui dire de ne pas se prendre trop au sérieux. C’est beau ça pour l’auditoire d’Oz, le fanatique qu’on a tous en nous (ok) ou pour des fanatiques peut-être pas si extrêmes que ça, mais ce n’est pas un remède pour les fanatiques en général !

Aussi, il y a un passage très bizarre dans lequel il dit que la Palestine et l’Israël sont avant tout les victimes du même oppresseur, c’est-à-dire l’Europe (!) qui a colonisé le monde arabe, discriminé les juifs et fait un génocide sans précédents. Wow ! Est-ce qu’on est encore obligé de mettre le fasciste sur table ? Est-ce qu’on ne peut pas chercher dans du plus actuel et aller moins dans les raccourcis ? J’avais l’impression qu’il recherchait quelqu’un à qui mettre le blâme, ce n’est pas de leur faute, c’est eux. Classique.

« Que peuvent faire les Européens ? Que peut faire le monde extérieur, à part se tenir la tête entre les mains et crier: "Quelle horreur !" Eh bien, il y a deux, peut-être trois choses à faire. Tout d'abord, ceux qui font l'opinion publique dans toute l'Europe ont cette mauvaise habitude, digne d'une vieille institutrice victorienne, de pointer du doigt l'un ou l'autre en disant: "N'avez-vous pas honte de vous ?" [...] Des vues simplistes, étroites, d'une grande autosatisfaction. Je ne suis, personnellement, plus du tout un Européen, sauf peut-être à travers la douleur de mes parents et de mes ancêtres qui ont mis dans mes gènes ce sentiment d'un amour déçu, d'un amour sans retour pour l'Europe. Mais je ne suis plus un Européen. Si j'étais encore un Européen, je ferais attention à ne montrer personne du doigt. »

Or, il montre du doigt les Européens par le fait même... Je ne sais pas quoi penser du recueil, ça part de bons sentiments, mais je ne sais pas, je le trouve un peu contradictoire et je me retrouve peu en lui...