Tous les hommes sont menteurs
de Alberto Manguel

critiqué par Elya, le 8 juillet 2010
(Savoie - 34 ans)


La note:  étoiles
Manguel ne pourra jamais me décevoir
Comme il est difficile de faire la critique d'un livre que l'on a moyennement apprécié mais qui est pourtant écrit par notre chouchou littéraire, celui que l'on arrive à admirer à travers de simples écrits, en étant persuadé qu'il ne nous décevra jamais.
Quel privilège j'ai eu de découvrir d'abord les ouvrages de Manguel qui se consacrent essentiellement à l'amour des livres (La bibliothèque, la nuit , Une histoire de la lecture, Journal d'un lecteur, La cité des mots), dont la forme se rapproche plus de l'essai que du roman.

J'attaquais donc avec gourmandise et sans préjugés ce livre. Et bien, cette attaque s'est renouvelée au moins 5 fois, tant j'étais incapable de saisir le sens des 4 premières pages. La confusion s'est sans doute mélangée à l'impatience, et je suis entrée dans le récit avec déjà des lacunes, n'ayant pas vraiment saisi qui était qui par rapport à qui dès les premiers paragraphes, faisant confiance à Manguel pour m'éclairer un peu plus loin.
Malheureusement cet éclaircissement n'est jamais vraiment venu, et ma confiance s'est alors transformée en petite déception. Comme si j'avais un peu gâché ce livre en étant passée à côté. Je n'ai donc pas eu énormément de plaisir à lire ce livre. J'ai dû le parcourir les sourcils froncés, hâtivement.

Heureusement, je suis fidèle à mes coups de coeur littéraire, et, un mois environ après avoir terminé Tous les hommes sont menteurs, je peux en dégager des facettes agréables.
Premier point, que j'avais d'ailleurs déjà ressenti pendant ma lecture, ici aussi Alberto nous interroge sur le monde littéraire, par l'intermédiaire de Terradillos, ce journaliste français, qui tente de réunir des informations pertinentes sur Alejandro Belivacqua, décédé.
Terradillos va donc se transformer peu à peu en enquêteur, en interrogeant tour à tour : un certain confident d'Alejandro, sa dernière épouse Andréa, son éditeur (car les énigmes convergeraient vers cette oeuvre, cet 'Eloge du mensonge', qui aurait été publié secrètement par Andréa), un camarade de prison lorsqu'il était détenu par la milice argentine, ainsi, attention, qu'Alberto Manguel (on arrive ici au summum de ma confusion), présenté en tant qu'intellectuel omniscient.
Vous vous en doutez certainement d'après le titre, mais ce roman n'aurait pas lieu d'être si les avis de ces différents protagonistes ne divergeaient pas totalement. Et c'est bien là que réside la nouvelle effluve de confusion, accentuée par ces prénoms hispaniques retenus si difficilement.
Et voilà donc les contradictions qui se mêlent aux confusions... Mais je ne doute pas un seul instant que cela n'était pas pleinement désiré, car l'intrigue semble tout de même rondement emmenée, subtilement élaborée, et le ton jamais prétentieux, même si l'écrivain s'inscrit dans le récit.

Qui est donc véritablement cet Alejandro ? Etait-ce vraiment le but de ce livre, que de définir tous les traits de cet énigmatique personnage ? Ou n'était-ce pas plutôt à nouveau un hommage au pouvoir de la littérature de faire éclore en nous un foisonnement interminable de questionnements, d'énigmes, éveillant notre sensibilité, titillant nos certitudes, et de signifier qu'il n'y a pas de vérité universelle ?

Enfin, il faut souligner qu'à nouveau Alberto Manguel étoffe notre bagage culturel, en abordant notamment le passage difficile du franquisme vers la démocratie, dans, vous l'aurez compris, cette Espagne peinte à merveille.