Eléonore à Dresde
de Hubert Nyssen

critiqué par Renardeau, le 8 février 2002
(Louvain-la-Neuve - 66 ans)


La note:  étoiles
Une déchirure de la mémoire
L'histoire d'une rencontre, toute de violence et de sensualité. Lui, Jean Pratt, ethnologue. Quelqu'un qui passe. Elle, Eléonore, actrice. Une prisonnière du passé. Depuis vingt ans, depuis son premier film, où elle avait atteint la perfection, jamais Eléonore n'a pu encore s'élever à ce niveau. Elle est l'actrice d'un seul film, "Dresde un soir", ode à la ville allemande martyre, monument du cinéma, référent de la guerre pour la mémoire collective, comme a pu l'être "Hiroschima mon amour".
D'égarement en égarement, Eléonore entraîne Jean Pratt dans son univers, ou plutôt à l'extrême limite de cet univers où personne ne peut vraiment accéder, maison de verre d'un passé où elle est restée échouée. Le temps écoulé, coulé sur les autres les empêche de la toucher. La violence, la peur et la souffrance de Dresde un soir sont ainsi, à jamais, le destin d'Eléonore.
Un portrait de femme brûlant des flammes de Dresde, puis éteinte dans les paysages flamands, près de la mer,
un soir ...
Un livre déchirant, le cri de toutes nos solitudes.
Hubert Nyssen est né à Bruxelles en 1925. Il est l'auteur de nombreux romans, essais et poèmes. Il s'est installé en Provence où il a fondé le Editions Actes Sud.
Deuil impossible 10 étoiles

"Eléonore à Dresde", c'est un roman violent, bouleversant. L'histoire est simple : un homme, Jean Pratt, passe une journée en compagnie de la célèbre actrice Eléonore Simon, connue pour un film "Dresde un soir", qui l'a rendue célèbre dans le monde entier, film dont Jean conserve toutes les images dans la tête.
Cette journée passée ensemble est celle de tous les affrontements, de toutes les tensions. Eléonore se sert de Jean pour revivre son passé, tenter de s'en arracher, faire le deuil de cette Eléonore d'il y a vingt ans dont elle aimerait tant se débarrasser et qui lui colle à la peau de manière insolente. Peu à peu, c'est une femme forte et fragile à la fois qui se dévoile devant un Jean terrorisé, une femme dure jouant constamment le rôle d'un personnage qu'elle croit être le sien. C'est un personnage dangereux, venimeux, qui se nourrit de ses pairs pour continuer à vivre dans l'illusion de ses souvenirs. Un langage simple et fort, une tension perceptible à chaque page, une femme que j'ai d'emblée détestée, un héros que j'avais envie de secouer pour qu'il se tire de ce guêpier. Le récit d'une femme prisonnière de son passé et de son image, et celle d'un homme qui a peur de briser l'icône qu'il a jadis tant adorée et qui aujourd'hui le fascine et le tourmente à la fois.
Un livre à lire d'une traite... en n'oubliant de pas, de temps en temps, de respirer.

Sahkti - Genève - 50 ans - 1 septembre 2004


Vive les Belges ! 9 étoiles

Nyssen, Bertin, Gevers,...je suis vraiment heureux de voir fleurir les critiques élogieuses sur quelques uns de nos grands auteurs ! A qui le tour ? Baillon, Chavée, De Coster, voire même Conscience ? A vos plumes les critiqueurs!

Patman - Paris - 61 ans - 8 février 2002