Journal d'un crime
de Charles Bertin

critiqué par Darius, le 7 février 2002
(Bruxelles - - ans)


La note:  étoiles
Nous sommes tous coupables
Marie Gevers dira de ce roman : Ce livre touche à l'un des problèmes humains les plus troublants et les plus cruels : le malheur d’un être innocent provoqué involontairement par une de nos actions qui nous a semblé inoffensives ou même bonne ou généreuse.. Notre responsabilité à tous dans le sort que, malgré nous, nous réservons à ceux que nous approchons, est un étrange tissu où se mêlent bien des fils, à commencer par celui de la destinée insaisissable.. Le livre nous conte la quête désespérée d’un ancien avocat après le suicide d’Elio, retrouvé noyé dans la Seine, peu après qu’il l'ait sauvé d'une tentative de suicide et qu’il l'ait réconforté... Elio lui avait promis de vivre, il s’y était engagé, comme son sauveur s’était engagé à lui retrouver sa femme.. L’enquête personnelle entreprise par cet ancien avocat fortuné le conduira à se livrer lui-même à la justice, chose que personne ne comprendra, ni le juge, qui n’est qu'un imbécile, ni son avocat commis d'office qui, aura pourtant l'intuition que la découverte du mobile du suicide est à l’origine des aveux... La surprise finale est un authentique coup de théâtre que je ne vous dévoilerais pas.
Mais Dieu n’est pas seulement Amour..(...). Avec ou sans Dieu, il y a de mauvaises morts, comme il y a de mauvaises vies..
L’avocat qui lui avait sauvé la vie, tout en inconsciemment la lui faisant perdre finira ses jours en prison, de sa propre volonté.
Fou, je le serais devenu, si j’étais resté libre.. C’est entre ces murs que j'ai commencé l'apprentissage de la liberté..
L'auteur nous parlera de la dimension du temps en prison : J'ai cessé d'être le maître indifférent de ma journée qui s'écoulait, naguère, au gré de mon humeur et de mon ennui... La nature et les hommes jalonnent maintenant son cours de bornes plus puissantes que ma volonté ou que mon caprice : l'heure du soleil, l'heure du repas, l'heure de la promenade, l'heure de la lampe.... C'est dans la contrainte qu'elle m'impose que je trouve le meilleur exercice de la liberté.
A propos de la responsabilité et de l'humanité. 9 étoiles

Comment oublier ce douloureux voyage intérieur? Journal d'un crime, il y a longtemps que je l'ai lu, et il reste pour moi plus emblématique de Charles Bertin que son doux "Petite dame en son jardin de Bruges". Le roman apparaît d'abord comme un policier habilement mêlé de récit d'analyse. Ensuite seulement, il devient une oeuvre essentielle portant sur la solitude de la responsabilité intérieure. Charles Bertin éclaire comment la fausseté inhérente à un événement peut entraîner à se jeter dans sa propre vérité. J'aime ton emprunt, Darius,
à Marie Gevers - grande dame des lettres belges - pour sa réflexion sur la responsabilité. Combien elle est vraie ! Il peut être extrêmement dangereux de vouloir aider.

Renardeau - Louvain-la-Neuve - 66 ans - 8 février 2002