Manifeste pour la Terre et l'humanisme : Pour une insurrection des consciences
de Pierre Rabhi

critiqué par CC.RIDER, le 11 mai 2010
( - 65 ans)


La note:  étoiles
Un livre majeur
Ce « Manifeste » n'est pas un énième programme électoral pour parti écolo sectaire ou groupusculaire, mais un exposé clair, net et précis des idées-forces d'un combat pour la terre et l'homme mené depuis des années par un homme sincère et honnête qui ne s'est jamais payé de belles paroles mais qui a toujours prêché par l'exemple. Environnementaliste avant même que le mot écologie fasse florès, il a pratiqué le retour à la terre bien avant les hippies de 68, l'agriculture biologique et biodynamique alors qu'elles étaient ultra-confidentielles, la décroissance quand le mot n'existait pas encore et la solidarité avec les paysans du tiers-monde bien avant que les ONG de tous poils n'entrent en scène. Un précurseur plein de modestie qui tire la sonnette d'alarme de façon étayée et réaliste loin des grandes théories fumeuses et catastrophistes qui secouent l'opinion quelques jours avant d'aussitôt retomber comme soufflé dans un courant d'air. Avec Rabhi, on ne se paye ni de mots ni de théories fumeuses. Et le bilan qu'il dresse n'en est que plus accablant...
Un livre majeur, passionnant, facile à lire. Chaque phrase porte car on sent derrière tout le poids de la vie et de la vérité. Avec Pierre Rabhi, on est à mille lieues de la langue de bois. Il parle avec son coeur, son bon sens et s'appuie sur sa longue expérience militante. Il ne se contente pas de dresser un tableau terrible de la réalité d'un système qui n'a aucun avenir. Si le monde entier consommait (gaspillait) comme nous, il faudrait trois planètes et comme les américains du nord, il en faudrait 6 ! Il propose des solutions simples, efficaces (relocaliser, jardiner, replanter, promouvoir les AMAP, l'agroécologie, la phytoépuration, le recyclage, les nouvelles technologies, les énergies renouvelables, l'auto-suffisance alimentaire, le procédé Vulcano qui réduit de 50% la consommation des moteurs diesel, etc...) Il donne des exemples de reconversions ou d'applications réussies sur le terrain (l'éco-site de La Borie, la ferme des enfants,, le monastère de Solan entre autres...) Puisse-t-il être entendu...
En route vers l'agroécologie? 5 étoiles

Pierre Rabhi défend ici des idées et des aspirations très intéressantes : le concept d’agroécologie qui, selon lui, devrait permettre de nourrir toute la planète sans utiliser de produits chimiques, la défense d’une vie proche de la terre et des qualités qui lui seraient inhérentes, une vision de la société plus humanisée, plus à l’écoute des hommes…
Cependant, ma formation scientifique m’a fait ressentir le manque d’information concrète dans ce manifeste. Les idées sont énoncées comme évidentes pour toute personne « intelligente » (d’après P. Rabhi), mais ne sont jamais démontrées logiquement. Aucun chiffre ni aucune analyse ne vient étayer la thèse de l’agroécologie. Certes, le but de ce manifeste est probablement de mettre en place des concepts plutôt que de les expliquer, mais l’un peut difficilement aller sans l’autre pour moi. Derniers points négatifs, le ton propagandiste, surtout dans la première partie du livre, et la structure éparpillée en petits paragraphes dont l’enchaînement n’est pas toujours évident.
Toutefois, j’ai beaucoup apprécié les perspectives plutôt optimistes proposées par le Mouvement pour la Terre et l’Humanisme d’une part, et d’autre part l’association d’idées écologiques et humanistes pour une meilleure société.

MeliMelo - - 35 ans - 1 juillet 2015


Qu'elle était bleue ma planète 10 étoiles

Cet essai est un fervent plaidoyer pour une révolution pacifique et collective des consciences. Pour que tous les peuples puissent redevenir les maîtres de leur propre destin. Fort de son expérience de plusieurs années et de sa combativité de chaque instant, Pierre Rabhi nous explique avec simplicité les nécessités que requiert la situation dramatique qui afflige notre environnement soumis à la surexploitation outrancière des intérêts privées au détriment du bien être de la collectivité.

Les grandes sociétés transnationales de l'industrie alimentaire sont parvenues à gangrener toutes les activités liées à la production des denrées alimentaires vitales à l'humanité en édictant une orthodoxie néolibérale qui considère que la moindre entité vivante n'est en fin de compte qu'une marchandise comme une autre et donc brevetable et commercialisable, la notion de gratuité relevant de l'hérésie la plus complète.

L'introduction des engrais chimiques pour rentabiliser la production agricole bénéficie avant tout aux multinationales agro-alimentaires qui pratiquent une spéculation meurtrière sur les récoltes et les élevages mondialisés. Enchaînés par les diktats des maîtres du monde, les peuples du sud se consacrent essentiellement à la production agricole destinée au nord, provoquant ainsi un abandon des cultures vivrières traditionnelles et primordiales à leur propre subsistance, ce qui se traduit inévitablement par une raréfaction des ressources nourricières locales et par conséquent une malnutrition voire une famine dans ces contrées.

Dans ces contrées éloignées des préoccupations occidentales, où les matières premières sont abondantes et la main d'œuvre bon marché et où la cupidité et la prédation peuvent s'exercer sans vergogne, les multinationales s'emploient à dévaster d'immenses territoires pour garnir nos assiettes de produits corrodés par toutes sortes de produits toxiques. Au point que l'auteur nous dit que désormais il ne faut plus souhaiter un "bon appétit" à son convive mais plutôt "bonne chance".

L'appauvrissement des sols par les engrais chimiques et les semences transgéniques accélèrent la destruction des ressources naturelles, en même temps qu'elle aliène la pérennité de l'espèce humaine à un paradis artificiel issu des laboratoires de l'infécondité, ultime négation du potentiel naturel de notre planète.

Pour couronner le tout, ces transactions internationales impactent sévèrement l'environnement à travers toutes les émissions polluantes que génère la fabrication des engrais chimiques et le transport énergivore des marchandises aux quatre coins du monde sous prétexte de rentabilisation censée dispenser ses bienfaits aux consommateurs dépossédés de leur droit d'expression face à la pieuvre tentaculaire du profit immédiat.

La planète terre poursuit sa révolution autour du soleil immuablement, suspendue dans un univers infini, affranchie de tous les mots ineptes que nous proférons pour conceptualiser le caractère sacré de la vie que par ailleurs nous bafouons sciemment à chaque instant, elle suit sa trajectoire elliptique loin des dieux que nous sacrifions au gré de nos humeurs. Terre d'accueil, elle nourrit la vie sous toutes ses formes avec bienveillance, octroyant à tous ses bienfaits sans autre objectif que l'accord parfait entre elles. L'homme, oublieux de ses origines enracinées dans la fertilité de la terre mère, s'est fait le chantre de la rupture entre la lumière de la vie et l'obscurité de son désir inextinguible de possession et d'asservissement de tout ce qui l'entoure.

L'homme moderne, engoncé dans ses certitudes arides, s'est arrogé le droit de dominer et de violer ce berceau de la vie, de modeler son environnement à l'image de son instinct prédateur, convaincu qu'il peut se déraciner de cette nature à l'aide d'algorithmes savants, passerelles vers la gloire dans ce monde tangible et le salut dans le monde intangible. Mais cet univers qu'il contemple depuis le belvédère de sa supériorité n'est en fait que l'appel du vide qui menace de le conduire à sa perte.

Garder les pieds sur terre est la sagesse de ceux qui contemplent les étoiles

Heyrike - Eure - 56 ans - 16 octobre 2013