L'Ange de Grozny de Åsne Seierstad

L'Ange de Grozny de Åsne Seierstad
( De krenkede : historier fra Tsjetsjenia)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités

Critiqué par Dirlandaise, le 10 mai 2010 (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 68 ans)
La note : 8 étoiles
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Les dégâts de la guerre au quotidien

Au sujet de l’auteur : Asne Seierstad est une journaliste indépendante norvégienne diplômée en russe de l’université d’Oslo. Elle a reçu plusieurs prix nationaux et internationaux pour ses travaux de journaliste et son livre « Le libraire de Kaboul », écrit en 2002, a été un succès international. Alors qu’elle était journaliste débutante, elle décide de se rendre en Tchétchénie par elle-même sans l’aide d’aucun organe de presse. Elle devra donc faire appel à l’armée pour le voyage et à l’arrivée, elle se débrouillera entièrement seule avant de rencontrer d’autres journalistes dont Martin Adler, un free-lance suédois qu’elle accompagnera pour une série de reportages dans une Tchétchénie déchirée par la première guerre sous Eltsine.

Dix ans plus tard, Asne décide de retourner en Tchétchénie afin de constater de visu de quelle façon le pays a évolué sous le gouvernement de Ramzan Kadyrov. Cette fois, elle est invitée par le président lui-même. Sous des dehors radieux, elle se rend compte que la réalité est bien différente du paradis tant publicisé par le régime Kadyrov. Certes Grozny s’est refait une beauté et toutes traces de guerre et de destruction ont été gommées mais la reconstruction s’est déroulée à la hâte et les immeubles sont vite et mal construits. Asne le constate lorsqu’elle prend possession de la chambre d’hôtel qui lui a été assignée. Le plafond fuit et se détache par plaques, plusieurs carreaux manquent dans la salle de bain et la toilette est branlante. Pourtant, l’immeuble n’est vieux que de deux ans. Elle brosse un compte rendu des différents événements auxquels elle a assisté entre autres l’investiture de Ramzan comme président, la visite du « Château de la jeunesse », l’inauguration du stade Dynamo dans lequel le père de Ramzan a trouvé la mort suite à un attentat à la bombe et qui a été entièrement reconstruit, sa visite au village de Tsentoroï, le fief du clan Kadyrov, son entretien avec le président etc…

Asne fera aussi la connaissance d’un couple de tchétchènes, Hadizat et Malik, qui ont décidé de venir en aide aux orphelins de Grozny en ouvrant un établissement destiné à les loger, les nourrir et leur donner une éducation convenable. Elle rencontre le père de Hadizat qui lui relate son vécu lors de la déportation de 1944 sous Staline et des souffrances et horreurs dont il a été témoin. Certains passages donnent la chair de poule tellement ils sont durs et je ne recommande pas cette lecture à des âmes le moindrement sensibles. Je pense au voyage en train vers le Kazakhstan et aux conditions de vie absolument inimaginables qui attendaient les Tchétchènes à leur arrivée là-bas.

Le livre débute comme un roman mais ce n’en est pas un bien que madame Seierstad ait tendance à édulcorer son propos et le noyer dans un style littéraire qui convient plus à de la fiction qu’à la réalité. Elle a aussi tendance à introduire un fort élément de sentimentalisme qui peut irriter à la longue. Elle s’attarde sur des cas particuliers comme ce soldat russe revenu de la guerre russo-tchétchène complètement aveugle après avoir sauté sur une mine et ses difficultés dans le quotidien ainsi que d’autres cas. J’avoue avoir préféré le récit de sa rencontre avec Kadyrov et sa description des aberrations du régime. Mais Asne Seierstad n’est pas Anna Politkovskaïa. Elle est beaucoup plus réservée et ne donne pratiquement jamais d’opinion personnelle sur les événements. Elle se contente de nous les relater tels que vus ce qui est déjà beaucoup. J’avoue préférer le caractère entêté, tenace et frondeur d’Anna. Le style de Seierstad est beaucoup plus doux. Son récit est davantage axé sur les dégâts de la guerre au quotidien que sur l’analyse politique. Certains chapitres m’ont semblé de peu d’intérêt comme le voyage en train pour son retour à Moscou où elle discute avec les autres passagers. Mais elle a sans doute voulu donner une idée de l’opinion des gens ordinaires face au « problème » tchétchène et de la bêtise de certains.

Il reste que c’est tout de même une excellente lecture qui apporte un point de vue différent sur les deux guerres russo-tchétchènes et de leur impact sur la vie des gens.

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