L'Etat morbide, tome 3 : Waterloo Exit
de Daniel Hulet

critiqué par B1p, le 7 mai 2010
( - 50 ans)


La note:  étoiles
Bruxelles secret
Il faut sacrément aimer les barges, les idées étranges et les délires ésotériques pour accrocher aux pages de la trilogie de l'"Etat Morbide".

J'assume.

J'ai adoré ça, au point de décerner au triptyque de Daniel Hulet mon prix personnel de meilleure trilogie en bandes dessinées de tous les temps.

Pourquoi cet accès, voire cet excès, d'enthousiasme ?

Parce que tout me caresse dans le sens du poil.
Le personnage central, peut-être, tout autant Bruxelles que le dessinateur tendance punk qui vient d'installer à quelques encablures de la place Sainte-Catherine.

L'humour, aussi, totalement ironique entre ces punkoïdes pas très propres sur eux qui viennent insulter de leur présence la vieille concierge d'un vieil immeuble, trop propre sur elle pour être vraiment honnête.

Le fantasme. Car la ville sans histoire de Bruxelles se révèle être le théâtre d'exactions hautement ésotériques contre lesquelles tout protagoniste, même armé d'une punkitude de bon aloi, ne peut pas grand chose. Car les immeubles de Bruxelles, tout calmes qu'ils puissent être, peuvent être rattachés par des couloirs sombres et secrets à la Tour Noire, vestige du Bruxelles médiéval où l'on commerçait avec le Diable au moins autant que l'on commerçait avec les marchands déchargeant le poisson de leurs bateaux faisant escale au coeur de la ville.

L'Etat Morbide, c'est ça : le fantasme d'un Bruxelles secret qui se réveillerait de sa torpeur pour révéler les commerces diaboliques issus du passé.

C'est la passion de Daniel Hulet pour le bizarre, l'étrange, le sale et le mal cadré, toute sa fascination pour l'ésotérisme, son amour des barjots, des punks, du rock industriel et des cafards qui grimpent sur les murs avant que les services de l'hygiène ne vienne assainir ce qui peut encore l'être.
C'est le décousu, l'imprécis, l'horrible et le féérique. Il n'est point besoin d'être Tim Burton pour réussir ça.

Et je garde toujours soigneusement les 3 albums mythiques (dans mon panthéon personnel) sur l'étagère, renfermant leur dédicace du Maître, aussi gratinée que les idées monstrueuses illustrées à l'intérieur.

Car enfin, qu'est-ce qui est le plus étrange ? L'Etat Morbide ou Daniel Hulet lui-même ?